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Histoire de Saint-Louis du Sénégal

Le 21 février 1700, André Brüe arriva à Albreda en Gambie, n’y trouvant pas le Gouverneur anglais Corker au Fort James, il repartie le jour même pour Bissao. Il y resta quelques temps, le commis Castaing, qui y avait été installé en 1698, avait perdu plusieurs de ses employés.

Carte Sénégal 1690

Carte Sénégal 1690 (source: Gallica - BNF)



André Brüe, malgré l’opposition des Portugais de l’île, traita avec Niumi Mansa le chef du pays, et obtint la permission de fonder un comptoir le 9 mars 1700. Il se rendit ensuite à l’île de Boulam, qu’il explora plusieurs jours. Il se la fit céder par le chef des Biafares, peuplade du fleuve; visita les îles Bissagos, recueillit des renseignements sur les populations Balantes, et retourna à l’embouchure de la Gambie.

Carte Sénégal 1707 Delisle

Carte Sénégal 1707 Delisle (source: Gallica - BNF)



De retour à Saint-Louis, André Brüe reçut une lettre de la Compagnie royale du Sénégal, datée du 10 février 1700, l’autorisant à construire le Fort de Galam. Le matériel nécessaires et les commis chargés de l’ édifier seraient envoyés. Il négocia donc avec le Chieratik et un rival, un Prince Foule appelé Samba Boué. Ayant obtenu leurs agréments, et l’assurance d’un passage pacifique pour les chalands et les barques, il envoya un commis pour construire l’établissement. Par commodité pour charger et décharger les barques, contrevenant aux directives, il le plaça si près de la rivière, qu’il fut emporté par les premières grosses eaux de l’année suivante 1701, avec une perte considérable des effets qui y étaient.

Il choisit une langue de terre plus élevée, et il fit construire des logements environnés d’une «tapade» bien terrassée, dans laquelle il plaça quelques canons en attendant qu ‘ André Brüe vienne en personne faire construire un établissement fixe et une meilleur défense.

Dans le courant d’avril 1700, il entreprit des négociations avec les Gouverneurs anglais Corker et Pinder, avec pour objectifs d’obtenir d’ eux que les marchandises fussent tarifiées dans la Gambie d’une façon uniforme. Les anglais ayant liberté du commerce, avaient fait hausser les prix par la concurrence. Ces négociations n’aboutirent pas à cause des contestations relatives à la saisie de quelques interlopes à Portudal. Le fort James fut prit en 1700 par des flibustiers français et repris en 1703.

Plan du Fort de Saint-Joseph vers 1700 (source Gallica)

Plan du Fort de Saint-Joseph vers 1700

Carte de l' Île Saint-Louis du Sénégal vers 1700 (source Gallica)

Carte de l' Île Saint-Louis du Sénégal vers 1700 source Gallica



André Brüe établit une relation de confiance avec la Linguère Ngoné Dièye du Royaume du Saloun, fondatrice de la dynastie maternelle Guedj (Géej) du Cayor et du Baol.
Pour établir une correspondance, elle lui envoya un jeune parent, en le priant de le garder auprès de lui, jusqu'à ce qu'il eût appris à parler et écrire la langue française. Ce jeune homme plein d'esprit et de bonne volonté, fut instruit en quelques mois.
André Brüe le fit habiller proprement et lui donna un fusil, un sabre, une sagaie, un coffre et des hardes pour le longtemps et le renvoya avec de très beaux présents.
Ils eurent une correspondance active et secrète.
Tandis qu'elle blâmait son fils le Prince Lat Soukabé Ngoné Dièye Fall 14ème Damel du Cayor, de ses excès et de ses emportements, elle lui demandait d'oublier ses injures et de pardonner ses fautes. Elle servait ainsi de médiatrice, et ses négociations furent souvent utile à André Brüe, qu'elle considérait comme son enfant.

Lat Soukabé Ngoné Dièye Fall, d'après André Brüe, donnait des témoignages sincères d'amitié, mais ces démonstrations n'étaient qu'apparentes, il se plaignait de ses violences et de ses trahisons.

En 1701, Lat Soukabé Ngoné Dièye Fall fit dire à André Brüe, qu'il se rendrait incessamment à Rufisque avec un grand nombre de captifs; que s'il voulait s'y trouver, ils oublieraient de part et d'autre les insultes passées, qu'ils feraient la paix, et qu'ils conviendraient d' un nouveau traité réciproquement avantageux.

Carte Sénégal 1690 (source: Gallica - BNF)

Carte Sénégal 1690 (source: Gallica - BNF)

André Brüe fit porter avec lui les marchandises dont il croyait avoir besoin et se rendit à Rufisque.
Lat Soukabé Ngoné Dièye Fall accompagné de ses officiers, lui proposa d'aller prendre l'air à cheval, il accepta et accompagné de deux commis, ils allèrent à une lieue de Rufisque, dans un village nommé Teynier, où ils entrèrent dans une case pour se reposer. Lat Soukabé Ngoné Dièye Fall en sortit et pria André Brüe de l'attendre un moment. Celui ci voulut le suivre, mais il trouva à sa porte son Condy, lieutenant-général du Damel, qui lui dit en le retenant, qu'il avait ordre de s'assurer de sa personne. Aussitôt ses hommes se jetèrent sur André Brüe et ses commis et les désarmèrent.

Arrestation d'André Brue par le Damel du Cayor Gravure parue en 1802 dans l' Atlas pour servir au voyage du Sénégal de Jean-Baptiste Durand (source BnF)

Arrestation d'André Brue par le Damel du Cayor Gravure parue en 1802 Atlas pour servir au voyage du Sénégal de Jean-Baptiste-Léonard Durand (source BnF)

Au même moment, tous les français se trouvant à Rufisque et au Cap Bernard furent arrêtés. Toutes les marchandise et tous les meubles qui étaient dans la maison d'André Brüe , jusqu'à ses habits et ceux des français furent pillés.
Lat Soukabé Ngoné Dièye Fall l'accusait de chasser ou d'enlever les vaisseaux étrangers venant traiter avec lui, et demandait une indemnisation de toutes les pertes qu'il avait éprouvés à cette occasion.
André Brüe était gardé à vue, Condy lieutenant-général couchait dans la case, elle même gardée par 25 ou 30 hommes, et deux corps de garde placés à peu de distance.

Lat Soukabé Ngoné Dièye Fall prososa aux membres de son Conseil de lui faire couper la tête, mais les plus sages pensant que cette action déclencherait une guerre avec les français, qui s'unissant avec leurs ennemis, ne manqueraient pas de désolé le Royaume, ils proposèrent un échange contre une rançon.

Lat Soukabé Ngoné Dièye Fall envoya des émissaires sur l'île de Gorée, où les officiers français, réunissant leurs forces, se préparaient à les attaquer et délivrer André Brüe.
Lat Soukabé Ngoné Dièye Fall demandait, outre le pillage qu'il avait fait des marchandises de la Compagnie royale du Sénégal et des effets d'André Brüe, tout l'or, tous les captifs et toutes les marchandises qui se trouvaient dans les magasins de Gorée et dans un vaisseaux qui venait d'arriver de France.

Après négociation, et la présence de deux vaisseaux français et quelques autres bâtiments qui vinrent mouillés à Rufisque, la rançon fut fixé à, y compris le pillage de Rufisque, 20,779 livres, en monnaie du pays, soit 7000 livres réelles, sans compter les pertes partculières d'André Brüe, Habits, Argenterie, meubles, Bagues et autres effets enlevés dans son logement, estimés à 6000 livres de France.

André Brüe fut libéré après 12 jours, il se rendit à Rufisque où il embarqua sur un vaisseaux de la Compagnie royale du Sénégal, pour se rendre à l'île de Gorée.
La nouvelle de sa libération se répandit au loin et tout le monde s'empressa de le féliciter. Brak et le Siratique lui envoyèrent leurs principaux officiers avec des présents et des compliments; les Bour-Bagenotof, Maad a Sinig du Sine, Bour du Saloum Sengane Kéwé Ndiaye les imitèrent.
Linguère Ngoné Dièye envoya son fidèle messager, pour lui assurer qu'elle avait en horreur la conduite de son fils Lat Soukabé Ngoné Dièye Fall, qu'elle avait partagé ses peines et n'avait rien négligé pour les faire cesser. Elle proposa sa médiation pour établir une paix ferme et solide entre la France et le Cayor

André Brüe n'en tint aucun compte, il fit garder les Côtes du Cayor, afin qu'aucun bateau étranger ne s'en approcha, il fit enlevé tous les canots et pêcheurs qui en sortaient, prit des esclaves, brûla des villages, et obligea les autres, sous peine de feu, de porter à Gorée, tous les bois et l'eau dont la colonie avait besoin.
Le commerce se rétablit; les esclaves, le morfil (ivoire brut) et autres articles que les africains avaient à vendre, furent payés en marchandises, au prix ordinaire, de manière que Lat Soukabé Ngoné Dièye Fall qui voulait placer celles qu'il avait volées à des prix excessifs, ne trouve plus à s'en défaire qu'à vil prix.

Après huit mois de conflit, le Damel du Cayor souffrant et les peuples prêts à se soulever, Lat Soukabé Ngoné Dièye Fall envoya un Ministre à Saint-Louis, pour prier André Brüe de lui envoyer à Cuba, où il séjournait, un commis nommé Moreau qui parlait fort bien le Guioloj, il y consentit en gardant le Ministre en otage

Moreau fut reçu d'une manière distinguée, Lat Soukabé Ngoné Dièye Fall lui fit l'accueil le plus amical. Il s'expliqua sur les motifs de sa conduite envers André Brüe; il reconnut n'avoir jamais eu à s'en plaindre personnellement; mais il prétendit qu'une de ses femmes, trompée par un chirurgien français, et énivrée par des drogues extraordinaires, avait eu avec ce particulier un commerce qui le déshonorait sa femme et lui; que ne pouvant s'en venger sur le chirurgien qui avait disparu, il avait cru devoir étendre sa vengeance sur toute la nation, et particulièrement son chef André Brüe; qu'au reste, comme il oubliait cet outrage, il fallait André Brüe oubliât ce qui s'était passé, et qu'ils devînssent amis comme autrefois.
Tel fut, à son retour, le rappport de Mr Moreau.
Le Ministre resté en otage, fut chargé de porter la réponse à Lat Soukabé Ngoné Dièye Fall. André Brüe lui fit dire que si le chirurgien s'était réellement rendu coupable, c'était assez de l'en instruire pour obtenir une réparation éclatante; mais lui, général, ne pouvait, dans aucun cas, être responsable de la faute de son chirurgien, et que le traitement qu'il avait éprouvé, était d'une rigueur sans exemple; qu'au surplus cette accusation, qu'il ne croirait jamais fondée, n'était qu'un prétexte ridicule; que cependant il vivrait avec lui en bon voisin, pourvu qu'il voulût éxécuter les traités avec plus d'exactitude qu'il n'avait fait et restituer ce qu'il avait enlevé à la Compagnie royale du Sénégal et à lui-même, dont on lui envoya les mémoires. Il lui proposa de lui faciliter les moyens de s'acquitter, en consentant à ce que les français enlevassent sur ses terres, des esclaves en nombre suffisant pour payer ce qui était dû.

Lat Soukabé Ngoné Dièye Fall refusa cette proposition, André Brüe ne s'y attendait pas, et envisagea de le faire enlever et envoyer travailler aux Antilles. Les choses étaient disposées pour cet enlèvement quand il reçut des ordres pressants de repasser en France, où la Compagnie royale du Sénégal avait besoin de ses lumières et de ses conseils pour arrêter la déroute de ses affaire: il s'embarqua aussitôt.

Lat Soukabé Ngoné Dièye Fall apprit avec un extrême plaisir le départ André Brüe; il en témoigna la plus grande joie, et ce n'était pas sans raisons; car il était perdu sans ressources, si André Brüe avait demeuré quelques temps de plus dans le pays.

Le 1er mai 1702, André Brüe quitte Saint-Louis, il est remplacé par Jacques Joseph Lemaitre

Dans la nuit du 23 décembre 1702 , les occupants du Fort Saint-Joseph à Dramanet, le quittèrent précipitamment en y mettant le feu, et s’embarquèrent à bord d’une barque chargée des meilleurs marchandises, des armes, des munitions et le peu de vivres qui restaient. Depuis plusieurs jours, ils se défendaient contre les attaques des Mandingues, qui les accusaient de faire commerce de leur liberté et de leurs biens.
Le Commandant du Fort Saint-Joseph venait de faire abattre une partie de son enceinte pour l’augmenter et la mettre plus en état de défense et avait fait démonter et mettre ses canons à côté du Fort qui était ouvert presque de tous les côtés, lorsqu’il fut attaqué par les Mandingues.

Extrait carte Sénégal 1726 Delisle (Gallica-BNF)

Extrait carte Sénégal 1726 Delisle (Gallica-BNF)



Nuit et jour ils firent pleuvoir dessus un grêle de flèches empoisonnées. Les commis et les employés de la Compagnie royale du Sénégal se défendirent pendant plusieurs jours, en tuèrent beaucoup, sans succès, ces pertes les irritaient au lieu de les décourager. La nuit ils apportaient des fascines et tout ce qui pouvait les couvrir en s’approchant du Fort pour y mettre le feu. Les munitions et les vivres commençant à manquer et les attaquants refusant toutes négociations, ils évacuèrent le Comptoir de Dramanet.
Ils furent obligé de prendre le milieu de la rivières, parce que les Mandingues, les suivaient le long du bord, dans l’espoir de les couvrir de flèches au cas où ils aborderaient. Ils démâtèrent la barque et la rasèrent jusqu’au pont, afin d’éviter de s’approcher du bord. Malgré cela ils furent contraint de la porter, presque à bras, toutes les fois qu’ils rencontraient des barrages et des bancs de sable. Ils commencèrent à souffler, lorsqu’ils arrivèrent sur le territoire du Chieratik. Le Commandant dépêcha un exprès pour avisé Jacques Joseph Lemaître de cet événement, qui mettra un terme pour cinq ou six ans, au commerce dans ce pays.

Fort Saint-Joseph du Sénégal vers 1700 (source Gallica)

Fort Saint-Joseph du Sénégal vers 1700 (source Gallica)

Fort Saint-Louis du Sénégal vers 1707

Fort Saint-Louis du Sénégal vers 1707 (source Gallica)


Le 14 septembre 1706, Michel Jajolet de la Courbe rédigea un mémoire pour la Compagnie royale du Sénégal, il lui conseillait d’établir un comptoir à Bissao sur les ruines du fort portugais ou dans l’île qu’il appellait l’île de la Sorcière.
À cette époque la Compagnie royale du Sénégal n’avaient d’établissements sur les côtes d’ Afrique, qu’à Saint-Louis, Gorée, Albreda et Gereges. Le Comptoir de Bissao et celui de l'île de Boulam, qu’André Brüe avait créés en 1700, étaient déjà évacués.

Le 6 avril 1706, Michel Jajolet de la Courbe partit de France avec deux vaisseaux pour remplacer Jacques Joseph Lemaitre.

À son arrivé à Saint-Louis le désordre régnait, il dut congédier un certains nombres d’employés, passa à Gorée, y fit mettre des réformes.

Il négocia avec le Damel du Cayor, Lat Soukabé Ngoné Dièye Fall, pour rétablir la paix. Il envoya une barque à Galam, qui était évacué depuis 1702 et une autre à Bissao; il entretint un commerce assez important à Rufisque.

Carte Sénégal 1707 Delisle

Carte Sénégal 1707 Delisle (source: Gallica - BNF)



Le 23 mai 1708, Michel Jajolet de la Courbe écrit au Contrôleur général de la Compagnie royale du Sénégal, l’avisant qu’il n’avait reçu aucune nouvelle de France depuis deux ans; que les commis, ses subordonnés, étaient réduits à vendre les effets de la Compagnie royale du Sénégal et même les leurs pour vivre. Que la Compagnie ferait mieux de renoncer à tout commerce que de se conduire si misérablement et en conséquence, demandait son rappel en France. À cette époque la Compagnie royale du Sénégal était complètement ruinée.

Le 20 février 1709, selon l’ordre de Louis II Phélipeaux de Ponchartrain, la quatrième Compagnie royale du Sénégal revend ses droits, à la « Compagnie des Marchands de Rouen » pour la somme de 250.000 livres, en se réservant, sous certaines conditions, la moitié du commerce.
La nouvelle Compagnie royale du Sénégal envoya au Sénégal, le Sieur Guilaume-Joseph Mustellier. Mais à nouvelle du changement de Direction, les commis abandonnés et non payés depuis 3 ans, s’émurent de l’oubli de leurs intérêts.

À Saint-Louis, Le Directeur général était Michel Jajolet de la Courbe; le Sieur de la Grande était Directeur particulier; le Sieur Poupart, commis teneur des livres; les Sieurs Lorgerais et Laugnel, commis; le Sieur Delor, commis au magasin; le Sieur Gensse, chirurgien; Neu, grand Tyvrongue; Bilou, visiteur, grand Tyvrongue.
À Gorée, le Sieur Charmette, Directeur et garde magasin, le seul bon sujet.

Le 18 décembre 1709, Michel Jajolet de la Courbe écrivit en leurs noms au Ministre, que ni lui ni les commis ne livreraient à cette nouvelle Compagnie royale du Sénégal, les forts, les marchandises, à moins d’être payés de plusieurs années de gages, qui leur étaient dues et qu’ils entendaient les garder en nantissement.
Le Capitaine Monterville qui apportait cette lettre, déclara que les employés étaient prêts à tirer le canon sur les chaloupes qui amèneraient leurs remplaçant. Il rédigea en date du 9 mars 1710 un mémoire faisant état des employés de la Colonie.

Un Arrêt du 14 avril 1710, ordonna que les sommes payées par les nouveaux associés aux commis, en échange de leurs marchandises, seraient remboursées par les anciens associés.

Le 11 juillet 1710, une lettre de Michel Jajolet de la Courbe, constatait qu’il avait remis les marchandises et les Forts de la Compagnie royale du Sénégal, au Sieur Guillaume-Joseph Mustellier. Et qu’il acceptait le poste de Directeur de Galam et s’engageait à y rétablir les Comptoirs ruinés depuis 1702. Devant les critiques sur son âge ( 57 ou 58 ans), et du fait qu’il radotait, il demanda même, qu’après ses trois ans de séjour à Galam, qu’il lui soit assuré une place dans la marine.

En 1710, selon les dires de Michel Jajolet de la Courbe, il avait négocié 113 captifs africains et onze marc d’or. Il alla visiter l’îl de Cagnou et changea son nom en île Pontchartrain, et déclara qu’il commencerait l’établissement en 1711, si la Compagnie royale du Sénégal lui envoyait les maçons. Il précisait qu’elle était à deux lieues de la ville de Congniou (probablement Médine), habitée par 4.000 Marabouts et à 15 lieues de Tambaora, célèbre mine d’or.

Carte Sénégal - Falémé 1716 Compagnon (source: Gallica - BNF)

Carte Sénégal - Falémé 1716 Compagnon (source: Gallica - BNF)



Carte Sénégal - Falémé 1716 Compagnon (source: Gallica - BNF)

Carte Sénégal - Falémé 1716 Compagnon (source: Gallica - BNF)



Plus loin était le pays de Guiara (Dinguiraye ?), d’où venaient les captifs Bambaras. Il alla jusqu’au Roches de Félou, qu’il appelle grande écluse, la rivière avait une lieue de large. À quinze lieues plus haut se trouvaient les Roches de Vouina, après lesquelles il était possible de remonter deux ou trois lieues sans obstacle.
Les «Marabouts» empêchant l’accès des mines d’or, il comptait construire un bateau de cuir pour remonter la Falémé, qui étaient pleines de roches. Ce bateau pourrait les heurter sans se briser, et il pourrait apprendre enfin d’où venait l’or que les marchands apportaient.

Le Sieur Guillaume-Joseph Mustellier, nommé Directeur Général, visita d’abord les Comptoirs, puis monta en 1711 jusqu’aux chutes du Félou, pour installer le poste que Michel Jajolet de la Courbe n’avait pu installer sur l’île de Cagnou, empêché d’occuper l’île, il choisit, près du fleuve, une montagne, appelée Tafalisgar. Mais sur le chemin du retour sa gabarre se renversa et il mourut noyé le 15 août 1711, près du village de Tuabou au Royaume de Galam, à une quinzaine de lieues de l’ancien Fort Saint-Joseph.

En 1712, De Richebourg, remplace Guillaume-Joseph Mustellier, au poste de Directeur de la Compagnie royale du Sénégal.

Le 26 mai 1712, de retour à Paris, Michel Jajolet de la Courbe écrivit de nouveau au Ministre Pontchatrain, que le Roi de Galam l’avait empêché de s’établir sur île de Cagnou, que le Sieur Guillaume-Joseph Mustellier lui avait défendu de s’établir ailleurs, et qu’à son retour; il lui avait reproché d’avoir manqué son projet, en essayant de le faire embarquer pour la France, puis l’avait envoyé négocier les captifs africains à la Martinique. N’ayant pas de fret de retour, il rentrait en France, quand il fut capturé par un corsaire de Flessingue. Privé d’emploi, chicané par la Compagnie royale du Sénégal sur les appointements qu’elle lui devait, il demandait justice au Ministre.

André Brüe, depuis le 29 décembre 1703, occupait en France, le poste de Directeur général du bureau central de la Compagnie royale du Sénégal, ce qui lui donnait la gestion de toutes les affaires, sauf à faire contresigner ses actes par les administrateurs. Il avait assisté, sans qu’il puisse être déterminé la part qu’il y avait pris, à la ruine et la liquidation de la Compagnie royale du Sénégal.
Après la mort du Sieur Guillaume-Joseph Mustellier, il fut sollicité par la nouvelle Compagnie royale du Sénégal, pour repartir pour le Sénégal, mais âgé et fatigué; il refusa d’abord et désigna à sa place pour le poste de Directeur le Sieur Pierre de Richebourg, alors Gouverneur de Gorée.
Celui-ci, continuant l’entreprise du Sieur Guillaume-Joseph Mustellier, choisit pour emplacement du Fort de Galam, que la Compagnie royale du Sénégal souhaitait rétablir, un endroit situé près de Makana, chez les Saracoles à quelque distance de Tamboukané. Mais il ne commanda que vingt mois et se noya le 2 mai 1713 sur la Barre de Saint-Louis.

Le 28 août 1713, une lettre, du liquidateur de la Compagnie royale du Sénégal, adressé au Ministre Pontchartrain, précisait qu‘André Brüe, ayant été nommé Directeur au Sénégal, le Ministre pouvait pourvoir au vice-consulat de Tripoli de Syrie dont il avait honoré André Brüe.

André Brüe dut alors accepté de reprendre la direction des comptoirs, il partit de Nantes le 15 mars 1714, et arriva à Saint-Louis le 20 avril 1714.
À cette époque, la situation politique créée par le Traité d'Utrecht lui imposait une grande réserve dans ses rapports avec les portugais et leurs alliés anglais. Il se concentra donc pendant les six années qu’il y resta, à exercer son activité dans les limites des Comptoirs. Il ordonna la poursuite de la reconstruction du Fort Saint-Joseph, commencée par le Sieur Pierre de Richebourg, et d’en faire un autre, nommé Fort Saint-Pierre, à Kaïnoura sur la rivière Falémé, qui fut fondé par un commis nommé P. Corniet. Cette fortification inquiéta les habitants, mais ce Fort, bien situé, fit un grand commerce grâce à l’affluence des marchands du Fouta Djalon.

Carte Sénégal 1716 de la Falémé par Compagnon

Carte Sénégal 1723 de la Falémé par Compagnon



Le 2 mai 1715 De Richebourg, se noie en passant la Barre de Saint-Louis.

Le 9 décembre 1716, André Brüe écrivit ses instructions pour le Sieur Jean-Baptiste Collé, qu’il envoya pour relever le Sieur P. Corniet, qui avait gardé pour lui une partie du prix des captifs africains et de l’or traité au nom de la Compagnie royale du Sénégal.
Il lui recommanda de faire l’inventaire des marchandises existant dans les Forts, de prévenir les Chefs africain des environs de son arrivée, de leur promettre que la Traite serait loyale, de tenir un juste milieu entre la timidité qui encourageait les pillards, et la fermeté qui pouvait être dangereuse; de ne pas maltraiter les Guyankas, de leur acheter d’abord leurs captifs, afin de les inciter à négocier ensuite leur poudre d’or.
Il voulait empêcher les Laptots de vendre en contrebande, du sel en Galam. La vente de sel à elle seule, permettait à la Colonie de subsister. Il augmenta le prix de la barrique de sel à 60 livres au lieu de 25 livres, et l’échange actuel de 4 barriques de mil contre une barrique de sel à six barriques. Il lui demanda de fouiller soigneusement les coffres des employés et de confisquer tout l’or qu’il trouverait et de chercher un blanc qui soit capable de dessiner la cataracte de Gouina, de remonter le fleuve pour voir si la Falémé et la Gambie prennent leurs sources du Niger, et de savoir où se trouvait exactement Tombouctou, se déclarant disposé à le gratifier honorablement, selon l’ importance de ses découvertes.
Il lui demanda également de lui envoyer des oiseaux, des animaux, des greffes, des plantes médicinales, et de s’informer auprès des africains, comment ils guérissaient leurs maladies, en particulier les descentes, le mal caduc et les fièvres malignes. Pour conclure, il lui recommande de tenir bonne garde, et de faire faire la prière, matin et soir, à tout le monde, en commun, en attendant la venue d’un aumônier.

Le 29 janvier 1717, André Brüe signa avec Ali Chandora, le Chef des Trarza, un Traité de commerce qui fut renouvelé en 1723: il concédait à la Compagnie royale du Sénégal le droit d’avoir un Fort à Portendick. Les français s’engageaient à y envoyer un certain nombre de navires et les Maures de leur apporter toute leur gomme. Le commerce de la Compagnie royale du Sénégal y commença aussitôt, avant même que l’escale fut occupée. En 1718 les navires saisirent des vaisseaux anglais et hollandais, qui avaient depuis longtemps l’habitude d’y venir.

Carte de l' Afrique française ou du Sénégal - Guillaume Delisle (Gallica-BNF)

Carte de l' Afrique française ou du Sénégal - Guillaume Delisle 1726 (Gallica-BNF)Source Gallica - BNF


Début 1717, Le Sieur Compagnon, Maître Maçon et Entrepreneur à Paris, probablement un de ceux que la Compagnie avait fait venir en 1712, pour construire le Fort Saint-Joseph de Galam, fut le seul qui osa se risquer à faire ce périlleux voyage du Bambouk.
La Compagnie lui donna des marchandises convenables au pays, de quoi faire des présents au Farim, c’est à dire aux Seigneurs des villages et à tous ceux qui pouvaient l’aider dans ses découvertes. Il fut le premier homme blanc qui ait visité ce pays.
Il fit par terre son premier voyage en droite ligne du Fort Saint-Joseph de Galam, à celui du Fort Saint-Pierre sur la rivière Falémé. Il y fit un autre en suivant les bords orientals de celle-ci, depuis Onneca jusqu’à Nayé, et un troisième par le milieu des terres depuis Babaiocolam sur le Niger, jusqu’à Netteco et Tanbaora, lieux fameux dans le centre du pays, par les riches mines d’or qui y sont répandues de tous les côtés, et extrêmement abondantes.

Copie Carte Cours de la rivière de Falème depuis les environs du Dambanna jusqu'à son embouchure dans le Sénégal par le Sr Pierre Compagnon (Gallica-BNF)

1723 Copie carte du Cours des Rivières de Falémé et Sanaga Dans les Pays de Bambuk et Tamba Awra, levé sur les Lieux par Mr. Compagnon Source Gallica - BNF


Carte du Cours des Rivières de Falémé et Sanaga Dans les Pays de Bambuk et Tamba Awra.Levé sur les lieux par Mr. Compagnon(Gallica-BNF)

1723 Carte du Cours des Rivières de Falémé et Sanaga Dans les Pays de Bambuk et Tamba Awra. / Levé sur les Lieux par Mr. Compagnon Source Gallica - BNF


Ses bonnes manières et ses présents lui gagnèrent aisément l’amitié du Farim de Kaïnoura, ce dernier le considérait comme un curieux désireux de contenter la passion qu’il avait de voir son pays. Il le fit accompagner par son fils jusqu’à Sambanura dans le Royaume de Coutou. Le Farim de ce village fut extrêmement surpris de voir un homme blanc, ses peuples et lui n’en avaient jamais vu de cette couleur.

Extrait Carte de la Falémé par Compagnon de 1723

Carte Sénégal 1723 de la Falémé par Compagnon



Supposant, à juste titre, qu’il venait pour l’or, les plus échauffés voulaient s’en défaire promptement et les plus modérés demandaient qu’il soit chassé , sans lui laisser le temps d’explorer le pays.

Le Farim de Sambanuna persuadé par les raisons du fils de son ami et les présents que lui fit le Sieur Compagnon, ainsi que par les principaux du lieu et leurs femmes, déclara que c’était un Marchand de probité, et qu’il était avantageux de l’attirer chez eux, puisqu’il leur donnerait de plus belles marchandises et à meilleur marché que les Guinéas et autres marchands à qui ils permettaient de venir traiter dans le pays.

Ce premier pas fut très difficile, et il ne fut pas le seul. Quoiqu’il n’alla jamais d’un lieu à un autre sans être accompagné des principaux des endroits qu’il quittait, il trouvait partout les mêmes difficultés, les mêmes soupçons et les mêmes dangers. Il lui fallait répondre à cent questions, essuyer de longs examens et il n’aurait pas avancé, sans se faire ouvrir le passage avec de nombreux présents.
Il lui arriva quelques fois que ses raisons, qui le portait à souhaiter de leur terre afin d’en faire lui même des cassots ou têtes de pipes; et ses présents, ne suffirent pas pour acheter de la terre ou des pierres de leurs mines. Ils soupçonnait qu’il n’était pas vraisemblable qu’un homme venant de si loin et avec tant de peines, ne venait que par curiosité ou pour avoir de la terre pour fabriquer des cassots et qu’il avait pour dessein de vouloir voler leur or et reconnaître le pays. La conclusion la plus ordinaire était de le chasser promptement ou de s’en défaire afin d’ôter aux autres blancs l’envie de le suivre.

Un jour à Toraco, où il avait fait affaire avec le Farim, il envoya un émissaire africain à Silabali, avec pour mission de lui rapporter du guingan ou terre dorée, et dire aux habitants de lui apporter leurs cassots et qu’il les paierait bien.
Le Farim de Silabari lui dit que le Farim de Toraco était fou de laisser voir son pays à un "Blanc" et de lui laisser prendre ses pierres et de sa terre, et qu’il était évident que ce "Blanc" était venu le voler.
L’émissaire africain rapporta cette réponse, sans adoucir les termes au Sieur Compagnon en présence du Farim de Toraco, qui répondit que le Farim de Silabari était un extravagant de vouloir appréhendé un homme seul au milieu du pays et de lui refuser de la terre dont il avait une si grande quantité qui lui était inutile.
Le Sieur Compagnon feignit de ne pas s’en soucier, et paya l’émissaire malgré qu’il ne lui eut rien apporter, cette générosité plut beaucoup. Il cacha l’envie qu’il avait d’avoir des échantillons de toutes les mines, en disant que quand il serait mieux connus, les africains ne feraient pas de difficulté pour lui vendre de la terre et des cassots. Ses bonnes manières jointes aux beaux présents qu’il savait distribuer à propos, lui firent des amis dans tous les endroits où il y a des mines et d’y prendre de la terre de d’y faire des cassots.

Le 18 juin 1717, André Brüe envoya en France, les échantillons de toutes ces mines, avec des cassots de toutes les façon, à bord d’un navire de la Compagnie royale du Sénégal appelé la «Victoire», commandé par le Capitaine Labbé.

En 1717, la nouvelle «Compagnie du Mississippi», qui réuni le commerce des Indes Orientales et Occidentales et celui de l'Afrique, rachète à la «Compagnie des Marchands de Rouen», le Commerce d'Afrique en sa possession pour 1.600.000 livres.

En 1718,La Compagnie du Sénégal vend son privilège à la Compagnie d'Occident (Compagnie des indes)>  fondée par John Law de Lauriston.

André Brüe fut maintenu à la tête de la nouvelle compagnie.

Portrait de John Law de Lauriston peint par Casimir Balthazar en 1843, réalisé d'après un portrait anonyme du XVIII siècle, aujourd'hui disparu, il est exposé au Musée de la Compagnie des Indes, Ville de Lorient (France)

Portrait de John Law de Lauriston peint par Casimir Balthazar en 1843, réalisé d'après un portrait anonyme disparu, exposé au Musée de la Compagnie des Indes, Ville de Lorient (France)

Le 23 octobre 1719, André Brüe donna ses instructions à son commis le Sieur Violaine, qui appointé de 700 livres par an, ayant le Sieur Paulin de la Poufolière comme garde-magasin à 500 livres par an, partait relever au Fort Saint-Joseph de Galam, le Sieur Jean Charles, remplaçant du Sieur Rahaut, lui même successeur du Sieur Collé décédé, et qui avait été tué par les africains.
Il lui recommandait d’augmenter les fortifications et lui donnait une escorte de blancs et d’africains biens armés, afin qu’il pût se défendre contre les Maures marocains, qui venaient courir dans les environs du Fort; de maintenir le prix des esclaves africains à 20 barres de fer et demi, y compris le coupe-corde; le prix de l’or à une barre le gros; de se renseigner sur Tombouctou, qui est à 600 lieues à l’Est de Galam, qui produisait, croyait-il beaucoup d’or.
À ce sujet, un Sieur Timstall de la Tour lui avait offert de faire ce voyage. Il était arrivé à Galam, il pria le Sieur Violaine de l’aider.
Il lui ordonna, afin de se déterminer, d’examiner à fond l’idée de certains des employés d’un établissement sur l’île de Cagnou, anciennement île Pontchartrain, qu’il devra renommé l’île d’Orléans.
Michel Jajolet de la Courbe avait voulu s’y installer, mais le Sieur Guillaume-Joseph Mustellier en dissuada la Compagnie, à cause de la violence du courant. Or un maître de barque, nommé «Soupir», qui avait fait le voyage avec lui, déclarait que c’était aussi facile d’ accès qu’à Makana.

Extrait Carte de la Falémé par Compagnon de 1723

Carte Sénégal 1723 de la Falémé par Compagnon



Le 3 octobre 1719, André Brüe, rend compte par courrier de la situation de la Colonie du Sénégal, à la «Compagnie d’ Occident». Il proposa d’occuper ou d’acheter au Roi de Barre, le fort anglais «James» ruiné, que des forbans lui avait remis, permettant d’anéantir le commerce des anglais, en arrêtant la passage des captifs Bambaras, que les marchands amenaient de Haute-Gambie.
Les vivres manquaient dans la concession de Saint-Louis depuis le mois de juillet, tout le monde vivait de mil comme les africains, et plus de vin depuis le 1er octobre 1719. Il recommandait de faire attention au choix des commis, car le climat du pays renversait la cervelle des lunatiques, des maniaques et des hypocondriaques. Les exemples de folie étaient fréquents.

Le 31 décembre 1719, venant de Gorée, arrivèrent deux barriques de vin, et 400 livres de farine qui seront gardées pour les malades, les valides se nourrissant de couscous.
André Brüe adressa un courrier à la Compagnie, disant qu’il se préparait à rentrer en France, laissant le commandement à son second, le Sieur Nicolas Desprès de Saint-Robert, et envoya en même temps les comptes arrêtés par les garde-magasins.

Le 6 avril 1720, dans une correspondance d’André Brüe au Sieur Masou, commandant à Bissao, il explique qu’il était entré dans sa 67ème année le 25 février 1720, qu’il aurait du repartir en France depuis décembre 1718, mais que le Conseil de marine lui avait ordonné de prolonger son séjour.

Le 4 mai 1720, la dernière lettre officielle d’André Brüe, remerciait la Compagnie de lui avoir obtenu du contrôleur général John Law de Lauriston, une gratification de 50.000 livres et une de 38.000 livres pour les employés.

Le 15 juin 1720, André Brüe rentra en France, où il arriva le 15 août 1720, fatigué, il se retira à Rouen.
. Il est remplacé par Nicolas Desprès De Saint-Robert au poste de Directeur de la Compagnie d'Occident (Compagnie des indes)>

Les postes occupés par les commis à la fin de son commandement étaient Saint-Louis, Gorée, les deux Forts de Galam, les Comptoirs de Joal, Albreda et Bissao.

Le 24 mai 1721, son successeur Nicolas Desprès de Saint-Robert, un vieux commis, qui avait servi à Galam, demanda son rappel à cause de ses infirmités. Il proposa pour le remplacer le Sieur Julien du Bellay, le teneur de livres du Sénégal.

Le 16 octobre 1721, des Maures Trarza, d’Ali Chandora surprennent un barque avec 16 hommes à bord, dont le Sieur Duval, commandant le Fort d’Arguin, qui revenaient de Saint-Louis et les tuèrent. Le 7 janvier 1722, la Compagnie nomma Julien du Bellay, pour remplacer Nicolas Desprès de Saint-Robert.

Le 28 décembre 1722, il ne restait plus ni farine, ni vin,, pas plus à Saint-Louis qu’à Gorée.
Les commis se nourrissaient de mil et buvaient de l’eau, le Gouverneur de Gorée avait dû vivre la moitié de l’année avec du riz. il n’avait ni linges, ni vaisselles, ni remèdes; tout le monde mangeait dans des gamelles. La garnison était composée de 16 hommes.

Le 13 janvier 1723, la Compagnie arma à Lorient une escadre de quatres frégates et un galiote, dont elle donna le commandement au Sieur Michel Friger de la Rigaudière, lieutenant des vaisseaux du Roi. André Brüe, nommé par le Roi Louis XV et la Compagnie, l’accompagna avec le titre de Commissaire général pour la régie de toutes les affaires de la concession du Sénégal.

Portrait Louis XV Par Louis-Michel van Loo

Portrait Louis XV par Louis-Michel van Loo exposé au Chateau de Versailles.



L’escadre arrive le 6 février au Cap-Blanc et débarqua dans l’île d’ Arguin 400 hommes qui s’avancèrent jusqu’à portée de canon du Fort. Le commandant hollandais Jean Beers, sommé de se rendre, refusa et prétendit que le Sieur de Both lui avait vendu et qu’il le tenait, en outre du Roi de Prusse, auquel il l’avait acheté pour 30.000 rixdales.
Avant d’ouvrir la tranchée, ils essayèrent de déblayer les citernes d’eau, que les hollandais avaient comblées. Ils n’y purent parvenir, et malgré les protestations d’André Brüe conseillant d’envoyer deux navires faire de l’eau à Saint-Louis, ils levèrent le siège le 22 février 1723 et allèrent mouiller au Cap Sainte-Anne, d’où André Brüe se rendit à Portendick.

Carte Sénégal 1690 (source: Gallica - BNF)

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Le 6 mars 1723, André Brüe, renouvelle le Traité avec Ali Chandora, chef des Maures Trarza, cédant le Fort hollandais abandonné. Il y laissa une garnison et se rendit à Saint- Louis. Puis il embarqua avec Nicolas Desprès de Saint-Robert le 25 avril 1723 pour Gorée et le 8 mai 1723, il repartit pour la France de Gorée et arriva à Groix le 8 juillet 1723.

Carte Sénégal 1690 (source: Gallica - BNF)Carte Sénégal 1690 (source: Gallica - BNF)">



Au mois d’ avril 1723, Julien du Bellay, prit son poste à Saint-Louis en remplacement de Nicolas Desprès de Saint-Robert, il y exerça son autorité jusqu’en 1726.

Fort Saint-Louis du Sénégal vers 1720Fort Saint-Louis du Sénégal vers 1720



En date du 14 octobre 1723, un rapport de Julien du Bellay, indiquait qu'il y avait au Sénégal (c'est à dire Saint-Louis) 30 canons, 60 blancs, et 50 Bambaras; 42 canons, 14 blancs et quelques africains à Gorée; 5 ou 6 blancs et quelques Bambaras en Gambie; 3 ou 4 blancs à Bissao; 1 directeur, 12 canons, 15 blancs et 15 Bambaras et quelques bâtiments en terre servant de captiveries au Fort Saint-Joseph de Galam.
La gomme était estimée à 6 livres le quintal, et 35 livres à la revente;
les captifs africains à 120 livres pièces et 800 livres à la revente;
le morfil à 72 livres le quintal et 150 livres à la revente;
la cire à 64 livres le quintal et 200 livres à la revente;
les cuirs à 10 sous et 3 livres 10 sous à la revente;
le marc d’or à 512 livres et 1000 livres à la revente.
Le paiement des employés à 200.000 livres et l’armement des vaisseaux à 420.000 livres.

Le Sieur Jean Levens de la Rouquette est nommé Directeur général et commandant du Fort Saint-Joseph le 24 octobre 1723, avec pour instructions de former un établissement le plus haut possible sur la Falémé, de façon à intercepter le commerce de la Gambie et s’approprier des mines d’or.

Fort Saint Joseph vers 1700 (source: Gallica - BNF)

Fort Saint Joseph vers 1700 (source: Gallica - BNF)



Le Fort Saint-Joseph, sur le fleuve Sénégal, près de Makana, était la base d’opérations. La Compagnie voulait y avoir cinq commis, 20 soldats, vingt Bambaras et l’autorisait à emprunter à Saint-Louis les ressources qui lui seraient nécessaires. Il pourrait emporter 4 mortiers, 6 canons avec des munitions, des médicaments, des outils, des ouvriers qu’il pourrait conserver dans le nouveau Fort.
Une fois installé au Fort Saint-Joseph, il devait remonter la Falémé, reconnaître le pays, et tâcher de se lier avec les africains,et faire un rapport sur les mines, laisser trois commis, 10 soldats et 6 Bambaras dans le Fort à construire, qu’il devait nommer Fort d’Orléans. Julien du Bellay était chargé de le ravitailler et correspondait avec lui. Le Sieur Jean Levens de la Rouquette était appointé de 3000 livres par an, et toucher 1% de la Traite des africains, 5% sur la traite de l’or et des vivres.

Le 19 décembre 1723, Julien du Bellay adresse à la Compagnie, un courrier demandant de compléter la garnison de Galam à trente hommes, celle de Gorée à trente et celle de Saint-Louis à quarante hommes. Il installa à Galam le Sieur Jean Levens de la Rouquette, comme directeur. Celui ci installa un Fort à Farbanna, sur la rive droite de la rivière Falémé, et un autre à Samarina, à une lieue et demi des mines de Tambaora en 1724.

Extrait Carte de la Falémé par Compagnon de 1723

Carte Sénégal 1723 de la Falémé par Compagnon



En 1724, une délibération des commis contresignée par Julien du Bellay, propose à la Compagnie d’établir un Fort à Bissao, à côté de celui abandonné par les portugais.

Le 15 décembre 1724, le Sieur Jean Levens de la Rouquette écrivit à Julien du Bellay, pour se plaindre des mensonges d’André Brüe et de Nicolas Desprès de Saint-Robert, concernant cette région, il était malade et demandait son retour; il renvoyait son sous-directeur le Sieur Gaffé, auteur d’un plan d’établissement dans le Bontou, qu’il trouvait incapable et accusait de vivre avec une prostituée, qui ayant 7 ou 8 compagnes, et chacune leurs pères, frères et cousins en si grand nombre qu’il fallait fortement prévariquer pour les entretenir.
Il demandait à être relever dès septembre 1725, préférant être petit commis à Saint-Louis qu’avoir 100.000 écus de rente sous le climat de Galam. Il le priait de lui dire s’il était disposé à rentrer en France, après ses 3 années de Direction, c’est à dire le 25 avril 1726, auquel cas, en tant que successeur en titre, il reviendrait à Saint-Louis en novembre 1725, où il resterait pour s’instruire du commerce en attendant de prendre le commandement.

En 1725 le Sieur Jean Levens de la Rouquette écrivit à la Compagnie, pour la déconseiller absolument de s’établir dans le pays de Bambouk, où les frais dépasseraient les profits.
Fin octobre 1724, il avait été empêché par les africains de remonter la vallée de la Falémé; il n’avait pu parvenir qu’à Naye, à 18 lieues de l’embouchure. Il envoya un canonnier nommé Huard, mais celui-ci ne put dépasser 3 lieues au dessus de Naye.

En avril 1726 le Sieur Jean Levens de la Rouquette, alors chef de Galam, remplaça Julien du Bellay, et gouverna deux période de trois ans de 1726 à 1733. Entre les deux (vers 1730), il fit un voyage en France et revint au Sénégal, avec un prolongation de 3 ans.

En 1730 la Compagnie envoya en mission le Sieur Pelay, habile artiste de la Monnaie de Paris, avec 5.900 livres. Il partit de Lorient le 6 juin 1730 , arriva le 26 juin à Saint-Louis et le 28 août à Galam. Accompagné du Sieur Boucard employé à Galam, il arriva le 22 septembre à Samarina, à trois quart de lieue des mines de Netteko, que le Sieur Jean Levens de la Rouquette avait installé en 1727 et où se trouvait une habitation gardées par 6 Laptots.
Le Sieur Pelay en partit le 22 novembre et arriva le même jour à Farbanna.

Carte Sénégal 1716 de la Falémé par Compagnon

Carte Sénégal 1723 de la Falémé par Compagnon



Il visita le lendemain la mine de Semella, situé sur un marigot d’eau vive; sous prétexte de chercher de la chaux et de l’argile à brique, il examina les puits où travaillaient les habitants et la terre aurifère. Il prétendait qu’une femme du pays pouvait laver en un quart d’heure dix livres de terre, qui contenait de 10 à 30 gros d’or à la livre. Ce qui était absurde car cela faisait entre 38 grammes et 114 grammes d’or pour 10 livres de terre.
(Vers 1910 des ingénieurs ayant explorés ces mines, estimaient à 6 grammes d’ or la tonne de terre, les alluvions du Bambouk.)

À son retour le Sieur Pelay se plaignit d’avoir été mal accueilli par le commis Lebegue qui commandait le Fort Saint-Joseph, celui-ci fut révoqué et remplacé par le Sieur Boucard. La Compagnie lui confia une seconde mission, le Sieur Pelay repartit avec un traitement fixe de 5.200 livres, et une remise de 10% sur le produit net de ses recherches, pour établir un Fort près de Netteko et diriger l’exploitation.

En 1732 , le Sieur Boucard était remplacé par le Sieur Pelay, comme Directeur général de Galam, avec sous ses ordres 21 commis et ingénieurs, 24 ouvriers, 20 soldats européens, 96 gourmets et 43 Laptots.
Le 1er septembre 1732, il demanda de lui envoyer 200 femmes pour le service de la garnison.

En 1732, la Compagnie envoya pour inspecter les écritures et les faire établir en partie double, son teneur général de livres de la Ferme du tabacs, le Sieur Lejuge, il arriva le 6 avril 1732, secondé par Pierre-Félix-Barthélémy David, fils d’un des Directeurs de la Compagnie française des Indes, avec le titre de Sous-inspecteur au Sénégal, qui y serait établit comme teneur de livres général au Sénégal.

En juin 1732, le Sieur Lejuge écrivit à la Compagnie pour se plaindre du Sieur Jean Levens de la Rouquette, qui ne le secondait pas. Il avait fait mettre aux fers, un de ses domestiques, qu’il avait laissé nommé aide-garde de magasins, et une fois nommé, il l’avait accusé de malversations et le renvoyait en France, uniquement pour lui nuire; et des commis qui le haïssaient parce qu’il était honnête.
Le Sieur Jean Levens de la Rouquette prétendait que sa mission se bornait à l’établissement des écritures selon les règles; et que pour les reste il était subordonné à lui. Le Sieur Lejuge demandait donc des ordres précis et déclarait qu’il avait les mains liées.
La compagnie le nomma au début de 1733, pour remplacer le Sieur Jean Levens de la Rouquette, dont le contrat se terminait. Le Sieur Jean Levens de la Rouquette était retourné en France, et comme son successeur Le Sieur Lejuge était en Gambie, le Sieur Devaulx prit l’intérim et lui écrivit pour lui annoncer sa nomination.
Mais il ne devait jamais prendre possession de son poste; embarqué sur un bateau de traite, il rencontra un si mauvais temps, qu’il fût forcé de faire route vers la Martinique; il mourut en mer le 7 mars 1733.
Le Sieur Devaulx l’annonça à la Compagnie par lettre le 30 août 1733, qui n’arriva en France qu’au mois de mai 1734.

En 1733, le Sieur Devaulx transmit une lettre du Sieur Beaufort, second du Fort Saint-Joseph, qui annonçait la mort de Sieur Pelay, attiré dans un Guet-apens par trois chefs Sarakholes et tué. Les commis survivants semblaient avoir perdu tout sang froid et ne firent rien pour l’ aider.
Le 3 mars 1733, le Sieur Devaulx, écrivit pour raconter la mort du Sieur Pelays tué à Dramanet le 21 décembre 1732, avec quatre autres commis, dans un guet-apens dressé par les Marabouts du village.
Il donna comme cause, l’esprit tyrannique de celui-ci, des menaces brutales qu’il faisait aux africains, qu’il violentait, se disant chef du pays, et les menaçait de saccager leurs villages et de les châtrer; dires qui ont été confirmé par le Sieur Lejure, qui lui trouvait un caractère trop vif.
La conséquence fut le retrait des ouvriers amenés par le Sieur Pelay, l’évacuation des Comptoirs de Farbana et Samarina et l’abandon de toutes recherches dans le Bambouk.

Extrait Carte de la Falémé par Compagnon de 1723

Carte Sénégal 1723 de la Falémé par Compagnon



En 1734 la «Compagnie française des Indes Occidentales» édita son règlement. À cette date, le Comptoir d’Arguin et de Portendik étaient définitivement abandonnés, il en restait un à Saint-Louis, Gorée et Albreda, et une case à Bissao, qui fut évacuée en 1736, et le Fort de Saint-Joseph en Galam.
L’administration était distinguée en trois départements: celui de Saint-Louis, celui de Gorée et celui de Galam, les autres comptoirs étaient supprimés ou desservis par la traite maritime. Il y avait un Conseil supérieur de direction à Saint-Louis, dont l’institution remontait à l’Edit de février 1726. Il était composé d’un chef, qui était le Directeur, et de 10 conseillers, dont quatre résidents, les autres étaient dits honoraires et répartis dans les Comptoirs.
Les principaux commis étaient, après le Directeur général, le Sous-Directeur inspecteur des Livres, premier conseiller; l’inspecteur général des magasins, deuxième conseiller; le Directeur général de Gorée, conseiller honoraire et premier teneur de livres, et le Directeur de Galam, conseiller honoraire et second teneur de livres et secrétaire du Conseil; les sous- directeurs de Gorée et Galam. Chaque département comprenait un Conseil particulier de direction composé de 3 personnes: le Directeur, le Sous-Directeur et la Garde-magasins.
Le Conseil supérieur s’assemblait une fois par semaine, décidait de toutes les affaires à la plurarité des voix, le chef ayant voix prépondérante en cas de partage. Ce conseil rédigeait et signait la correspondance, le Directeur général donnait les ordres; les conseils particuliers et subordonnés prenaient ceux du Conseil supérieur pour la Traite.
Il y avait 25 commis, dont 5 du premier ordre, 3 à Gorée, 2 à Galam; 3 du second ordre, 2 à Gorée et 2 à Galam, etc.. soit un total de 36 commis au lieu des 49 qui existaient en 1733. La Compagnie voulait placer les nouveaux, les six premier mois, à Gorée, afin qu’ils s’acclimatent, et se réservait toutes les promotions.
La marine particulière de la Compagnie se composait d’une dizaine de vaisseaux, dit de seconde navigation. Elle comptait, 35 officiers de marine, répartis entre les trois départements, auxquels elle en ajouta neuf, soit un total de 44 officiers. Elle réduisait le nombre d’ouvrier de 46 à 40, celui de domestiques blancs de 8 à 3.
La garnison composée de 76 soldats, répartit à raison de 42 à Saint-Louis, 16 à Gorée et 20 à Galam. Il y aurait désormais dans la Concession 215 blanc au lieu de 237. Le service intérieur était fait par les captifs africains, dont le nombre fut réduit de 233 à 174.
Le résultat de ces modifications diverses fut de réduire les dépenses administratives de 150.029 livres 10 sous à 137.869 livres 13 sous. Les dépenses totales, y compris la Traite, de 762.142 livres en 1733 furent ramenées à 748.725 livres 8 sous. Le produit total de la Traite était de 1.383.100 livres; elle e composait de 10.000 quintaux de gomme 1.450 captifs africains, 100 marcs d’or, 200 quintaux de cire brute, 97 quintaux de morfil.
Compte tenu de la perte éprouvée par la Compagnie par le sucre, que les planteurs de Saint-Domingue, donnait en échange des esclaves, les directeurs estimèrent que cette réforme, devait rapporter un bénéfice de 1.402 livres 6 sous.

À la suite de ce rapport, le Sieur Devaulx, nommé Directeur général du Sénégal en août 1734, est révoqué comme incapable le 7 octobre 1734 et remplacé par le Sieur Judde, qui ne prit pas possession de son commandement. Le Sieur Devaulx continua à diriger les affaires comme intérimaire, puis en 1736, il signa comme Directeur général, les lettres du Conseil supérieur du Sénégal.

Le 4 mai 1736, face aux refus de tous les autres commis d’évacuer le Comptoir de Bissao, jadis établit par André Brüe en 1698, où les employés étaient continuellement maltraités par les africains et, où se trouvaient 300.000 livres de marchandises, Pierre-Félix-Barthélémy David s’embarqua avec 30 hommes, sur le bateau l’«Aventurier». Il réussit à embarquer tout ce qu’il y avait de la valeur, mais tombé malade à la suite de cette expédition, il prit un congé qu’il alla passer en France.

En 1738, Pierre-Félix-Barthélémy David, était nommé Directeur général et chef des Comptoirs de la concession du Sénégal. Il partit à bord du vaisseau la «Victoire» et passant devant la Baie d’Arguin, il fit la chasse à des vaisseaux interlopes venus charger de la gomme. Mais il fit naufrage sur le Banc de Tendel, à 10 lieues de Portendik, il partit à bord d’une barque pour y aller chercher du secours, il y trouva un croiseur royal et le conduisit sur les lieux du naufrage et parvint à sauver l’équipage en péril.

Carte Sénégal 1690 (source: Gallica - BNF)

Carte Sénégal 1690 (source: Gallica - BNF)



Le 25 ami 1740, pour arrêter la contrebande anglaise de gomme il signa un Traité avec la «Compagnie Royale d' Angleterre», représentée par Charles Orfuse, ayant pour objectif d’échanger annuellement 360 milliers de livres de gomme contre 300 des captifs africains, et la neutralité en temps de guerre pour les vaisseaux employés à ce service. En dix ans les anglais fournirent annuellement 300 captifs contre 360.000 livres de gommes, soit 1.200 livres la pièce d'Inde.

En 1741, Pierre-Félix-Barthélémy David retourna en France et proposa à la Compagnie de recommencer l’exploitation du Bambouk. Il avait apporté quelques sacs de terre aurifère, qui furent lavée et analysée, de telle sorte que la Compagnie l’autorisa de nouveau à explorer la région.

Son succès lui valut d’être nommé en 1742, par commission spéciale: Gouverneur des Forts, îles, comptoirs et habitations de la concession du Sénégal, compris le Cap-Blanc à Sierra Leone, et Président du Conseil supérieur, pour y commander les habitants, commis, officiers et gens de guerre.

Le 11 juillet 1744, Pierre-Félix-Barthélémy David avec 60 hommes partit de Saint-Louis pour faire le voyage de Galam. Il parvint jusqu’à l’île de Cagnou, remonta la Falémé jusqu’à Farbanna et fit construire un Fort.

Carte Sénégal 1716 de la Falémé par Compagnon

Carte Sénégal 1716 de la Falémé par Compagnon



Dans un rapport il prétendait qu’une laveuse du pays obtint devant lui en une heure une quantité prodigieuse de paillettes d’or, rien qu’en lavant le sable des puits indigènes en exploitation. Il évaluait le produit à deux grains d’or à l’once, soit 15 centigrammes et demi d’or par 30 grammes de terre, ce qui représentait 5 kilogramme à la tonne, proportion qu’aucune mine connue n’avait jamais atteinte.
Il vit la mine de Netteko d’où il revint jusqu’aux bords de la Falémé. Ce voyage fait en plein hivernage, coûta la vie à 20 personnes qui la composaient. Il commença un établissement à Podor, chez les Braknas, qui fournit jusqu’en 1746 des vivres à Saint-Louis.

En 1746, Pierre-Félix-Barthélémy David, fut nommé au gouvernement des Îles de France et de Bourbon, à la place de la Bourdonnais, et était remplacé par son cousin, le Sieur Pierre Estoupan de la Brüe.
Les forces militaires à Saint-Louis étaient de 42 mariniers et 26 hommes de troupe de terre. Il resta en poste jusqu’à la prise de Saint-Louis en 1758.

En 1748, la Basse-Falémé fut parcourue par un commis appelé Duliron. Il leva le plan de cette rivière, qu’il parait avoir remonté assez haut. Il nomma des localités qu’il est difficile d’identifier: Cicella, Debou (qui pourrait être Senoudebou), Cacoulou, qui serait à quatre jours de marche de la Gambie. Il cite le marigot de Dalamounet, qui naît près de Keniba (Kenieba); de l’embouchure de ce marigot jusqu’aux mines de Netteko, il y aurait dit-il neuf lieues. Il place Cicella en aval de Dantella ou Dantillia, et cette dernière localité à trente lieues de l’embouchure de la Falémé.

Extrait Carte de la Falémé par Compagnon de 1723

Carte Sénégal 1723 de la Falémé par Compagnon



Le 3 mars 1749, le Sieur Michel Adanson, recommandé, avec promesse d’emploi dans les concessions, par Antoine Lely David, père de Pierre-Félix-Barthélémy David, embarqua à Lorient.
Il arriva le 25 mai 1749 au Sénégal. Il commença par apprendre le Wolof et pendant plusieurs mois parcourut les îles et le continent voisin de Saint-Louis.
Il chassa et herborisa dans l’ île de Sor, dans l’île de Thionq et sur la Grande Terre.

En juin 1749, il poussa jusqu’à l’escale des Maringouins et gagna le Podor où il arriva avec un convoi de Traite. Il fit de ce poste, qui avait la réputation d’être un des plus chauds et des plus malsains du Sénégal, une description qui semble extraordinaire, parce qu’elle était à la fois fleurie et enthousiaste. C’était à peine si ce poste existait depuis quelques années.
Le Sieur Adanson déclare que le jardin produit des oranges, des citrons, des figues, des grenades, et tous les légumes d’Europe. Il y vit deux autruches élevées par des commis, et les fit monter par des africains, pour se rendre compte de l’usage qui pourrait être fait de ces animaux comme coureurs et comme porteurs.

En juillet 1749, il partit pour Gorée, qu’il trouva imprenable et vit de nombreux jardins plantés d’arbres fruitiers et de légumes; il trouva le séjour salubre et charmant.
En août 1749, il visita Portudal, où ne se trouvait plus de Comptoir français, et revint en septembre à Gorée.
Il explora les îles de la Madeleine, et retourna à Saint-Louis au mois d’ octobre 1749. 8 jours après il repart pour Podor, sur sa route il signala la présences de nombreux hippopotames, d’éléphants, de tigres, c’est à dire des panthères et des léopards. C’était la fin de l’ inondation et il trouva le pays extrêmement agréable, couvert de verdure et d’une fertilité qui contrastait avec la réputation qui lui était faite.

En 1750, Sieur Michel Adanson fait un voyage à l'île de Gorée et poussa jusqu’à Albreda en Gambie avec Pierre Estoupan de la Brüe et son frère Blaise Estoupan de Saint-Jean, Gouverneur de l'île de Gorée, qui allaient rétablir le Comptoir, détruit par les anglais en 1745. De retour à l'île de Gorée, il parcourut la presqu’île de Dakar et les rivages du Cap-Verd.

Carte de l'île de Gorée en 1750 C. Inselin

Carte de l'île de Gorée en 1750 C. Inselin - Source Gallica - BNF


Extrait Carte particulière de la Côte Occidentale de l'Afrique Depuis le Cap Blanc jusqu'au Cap de Verga et du Cours des Rivières de Senéga et de Gambie dressée par Anselin

Carte particulière de la Côte Occidentale de l'Afrique Depuis le Cap Blanc jusqu'au Cap de Verga et du Cours des Rivières de Senéga et de Gambie dressée par Anselin en 1751 (Gallica-BNF)



Revenu en juin 1750 à Saint-Louis, il ne voyagea plus et passa son temps à faire des excursions scientifiques autour de Saint-Louis.
Le Sieur Michel Adanson dépeindra la ville et les moeurs de ses habitants. Ceux-ci exploitaient d’immenses bancs de coquilles, que les savants croyaient être des bancs d‘huîtres abandonnés par la mer dans le lit de marigots desséchés. Ces bancs étaient couverts d’un bois très épais, avec des arbres de trois pieds de diamètre. Dans ce banc était creusé des fours à chaux. Quant aux salines de Gandiol, c’étaient à cette époque, des marais de 200 à 300 toises de longueur, sur 100 toises le largeur, remplis d’eau salée extrêmement âcre.

En août 1753, le Sieur Michel Adanson fit une troisième excursion à Podor, mais épuisé par ce long séjour en Afrique, il eut un accès de fièvre extrêmement grave, et, péniblement rétabli, il se rembarqua pour la France au mois de septembre 1753.

Extrait Carte des peuples du Sénégal, pour servir à l' intelligence de leur histoire dressée par D. Boilat en 1853

Carte des peuples du Sénégal, pour servir à l' intelligence de leur histoire dressée par D. Boilat en 1853(Source Gallica-BNF)

En 1755, à la reprise de la guerre contre l'Angleterre (guerre de 7 ans), la garnison de Saint-Louis était composée de 40 homme, celle de Podor de 28 hommes, celle de l'île de Gorée de 40 hommes, et celle de Galam de 30 hommes..

En 1756, le Sieur Aussenac, qui commandait le Fort Saint-Joseph de Galam, fit un voyage à Natakon, il était le Directeur de l’établissement de Farbana, restauré par Pierre-Félix-Barthélémy David. À la même époque le Sieur Doit, explora la pays entre Farbana et la Falémé, au Nord de Kéniéba, et prétendit avoir trouvé des nouvelles mines dans un pays qu’il appelait Kenimaly.

Extrait Carte de la Falémé par Compagnon de 1723

Sénégal carte 1723 de la Falémé par Compagnon (Gallica-BNF)



En mars 1758, la Compagnie envoya 30 hommes de renfort avec 20 canons de 24; 46.000 livres de poudre, 2 mortiers et 100 bombes à l'île de Gorée.

En date du 23 avril 1758, une escadre anglaise de 14 voiles attaqua Saint-Louis, dirigée par le Sieur Pierre Estoupan de la Brüe, qui capitula le 30 avril 1758 par suite du manque de poudre.
En vertu de la capitulation, la garnison de Galam (30hommes) fut retirée la même année, et celle de Podor (20 hommes) l'année suivante pour être ramenées en France avec tout le personnel. l' île de Gorée, bien que renforcée de 200 hommes en janvier 1758 et 30 hommes avec 20 canons, 2 mortiers et 100 bombes en mars 1758 ; attaqué le 23 avril 1758 par l'escadre anglaise, capitula en décembre 1758.

Le 26 avril 1758, les anglais attaquèrent l'île de Gorée, qui résista. Peu de jour après la retraite des ennemis, le commandant de l'île de Gorée découvrit un complot de la garnison; il devait être assassiné par le factionnaire placé à sa porte. Il parvint à arrêter les meneurs et 13 furent condamnés à mort. Il ne poussa pas trop loin l’enquête de peur de découvrir trop de coupables.

Au mois de décembre 1758, devant une nouvelle attaque anglaise, le Commandant de l'île de Gorée capitula.

En 1763, Traité de Paris, restituant l'l'île de Gorée à la France, le Roi Louis XV y nomma le Sieur Poncet de la Rivière comme gouverneur. Deux compagnies de 63 hommes chacune, placées sous le commandement d'un major et ayant à leur tête un capitaine, formèrent la garnison de l'île, qui fut renforcée, deux ans après, par une troisième compagnie.

En 1763, Poncet de la Rivière négocia avec le Damel du Cayor (Meïssa Bigué Ngoné Fall, la cession de la péninsule du Cap-Verd depuis le Cap-Manuel jusqu’au Cap-Bernard. Là se trouvaient les villages de Dacart et de Ben.
En 1765, ce traité était renouvelé entre Poncet de la Rivière et le Damel Madior Dior Yacine Isseu Fall.

Extrait Carte du Sénégal dressée en 1750 par Sorel

Carte Sénégal dressée en 1753 par Sorel Source Gallica - BNF



En 1773, le Fort du haut de l'île de Gorée était reconstruit, mais sans canon, ni plate-forme pour l’artillerie. Dans les magasins, couverts en paille, tout était pêle-mêle; les officiers logeaient chez l’habitant. La population ne comprenait plus que des africains, au nombre de quelques centaines et des esclaves. Les traitants africains et mulâtre ne s’occupaient que du commerce des esclaves et ce commerce était si misérable, que la case d’Albreda était considéré comme la plus importante.

En 1774, la population de l'île de Gorée était de 100 mulâtres et de 100 africains libres, il y avait 1.200 esclaves. La garnison était composé de 100 hommes, véritables brigands débauchés

Le 19 avril 1776, Monsieur de Bellecombe et l’intendant Chevreau, missionnés par le Ministre de la Marine, Monsieur Antoine Raymond Jean Gualbert Gabriel de Sartine, comte d'Alby, lui adressèrent de l'île de Gorée, un état des colonies.

Portrait Antoine de Sartine

Antoine Raymond Jean Gualbert Gabriel de Sartine, comte d'Alby (Wikipedia)



À cette époque sur l'île de Gorée, il y avait une maison avec un jardin qui servait au Gouverneur, une caserne pour les 80 hommes de la garnison, un corps de garde, un hôpital, une église, cinq magasins, une poudrière, une prison, quatre maisons en pierre occupées par les officiers; tous les bâtiments étaient couverts en paille; la marine se composait de deux goélettes et les dépenses mensuelles de 3.960 livres 1 sous 4 deniers.
La population était de 139 blancs, y compris la garnison, 1.430 africains, dont 110 libres et de 120 mulâtres. Ils traitaient par an 200 ou 300 captifs, valant 300 à 400 livres la pièces. Il y avait une case à Joal, une à Portudal et une à Albreda.

Le 21 avril 1777, la Compagnie de la Guyane fut chargée de ravitailler la garnison et l'île de Gorée, et reçut en échange, le privilège exclusif de la Traite négrière pour 15 ans, moyennant le paiement de la solde de la garnison et l’entretien des magasins.

En 1778, une épidémie de Fièvre jaune ravagea l'île de Gorée. Tous les Européens furent malades et 43 moururent.

En 1778 le Sieur Gauthier de Chevigny remonta au Fort de Saint-Joseph à Galam avec une flottille de 30 bâtiments, pour y reprendre un commerce que les anglais n’avaient pas continué.

En date du 28 janvier 1779, une escadre française commandée par Louis-Philippe Rigaud, Marquis de Vaudreuil et composée du vaisseau du Roi Le Sphinx; des frégates> La Résolue, La Nymphe et La Lunette ; des corvettes> Le Lively et L'Epervier et des vaisseauxdu Roi Le Fendant, La Tartane et La Toussaint, portant des troupes de débarquement aux ordres de Armand-Louis Gontaut Biron, Duc de Lauzun ; mouilla devant Saint-Louis. Louis-Philippe Rigaud, Marquis de Vaudeuil fit tiré une cinquantaine de coups de canon sur le fort, qui après en avoir rendu quelques uns, amena son pavillon.

Fort Saint-Louis en 1779Fort Saint-Louis en 1779



La reddition eut lieu le 30 janvier 1779, sur la sommation de Armand-Louis Gontaut Biron, Duc de Lauzun, qui refusa les offres de capitulation du commandant anglais Robert Stormont, mais exigea que la garnison se constituât prisonnière de guerre. La plus grande confusion régnait dans le fort à ce moment. Les soldats anglais avait chassé le Gouverneur par intérim Georges Fall et avaient tué ou blessé un certain nombres d'habitants.

Rédition Georges Fall le 30 janvier 1779Rédition Georges Fall le 30 janvier 1779


Saint-Louis du Sénégal vers 1780Saint-Louis du Sénégal vers 1780


Armand-Louis Gontaut Biron, Duc de Lauzun prit le commandement du Sénégal. En entrant dans sa nouvelle résidence officielle, il trouva ses appartements dans le plus grand délabrement et démunis de tout nécessaire. Il rentra en France au mois de mars 1779, dans son mémoire, il préconisait pour Saint-Louis, une garnison avec un effectif de 300 hommes en tant de paix et 600 en tant de guerre ; ajoutant qu'il serait avantageux de maintenir cet effectif en tout temps, en raison des nombreuses maladies occasionnées par le climat; il concluait, en pensant aux inconvénients de la barre du Sénégal (Saint-Louis), et les conséquences désastreuses que cet obstacle aurait pour le développement du fleuve, que cette garnison ne devait comprendre qu'un poste « qui protège et assure la navigation de la rivière ».
Il fut remplacé par le Lieutenant Eyriès, qui l'accompagnait.
Dès sa prise de commandement, il fit raser les fortification de l'l' île de Gorée dont la population fut, à la suite d'une épidémie de fièvre jaune, évacuée et vraisemblablement transportée en Guyane.
Après ce départ, les anglais, attirés par le commerce de la gomme, s'y installèrent, jusqu'au 23 mai 1784, où André Charles, Marquis de Jaille à la tête d'une escadre la réoccupa conformément au Traité de Versailles du 28 septembre 1783. Le lieutenant Eyriès, tombé malade, quitta le Sénégal en janvier 1781 et fut remplacé par le Anne Gaston Dumontet, premier gouverneur de la colonie après sa reprise.

Celui ci reçut l'ordre de réinstaller le comptoir de Podor, le Fort de Saint-Joseph à Galam et d'en ouvrir un à Dabou et un autre à Dentillia (Sansanding), ainsi qu'un établissement à l' île de Bilbao. À cet effet, il reçut 600 hommes formant 6 compagnies, dont une d'artillerie. Ce corps nommé « volontaires d'Afrique » commandé par un Major et 4 officiers par compagnie, fut décimé par le climat, en 1782, il ne comptait plus que 182 soldats.

Carte du Cours des Rivières de Falémé et Sanaga Dans les Pays de Bambuk et Tamba Awra.Levé sur les lieux par Mr. Compagnon(Gallica-BNF)

1723 Carte du Cours des Rivières de Falémé et Sanaga Dans les Pays de Bambuk et Tamba Awra. / Levé sur les Lieux par Mr. Compagnon Source Gallica - BNF


En 1782, un mémoire évaluait la Traite négrière à 104.000 esclaves africains, dont 53.000 par les anglais, 23.000 par les français, 11.000 par les hollandais et 8.700 par les portugais.
Les navires destinées à cette traite, étaient construits sur un modèle particulier. Le pont était un peu exhaussé ainsi que la dunette. Un navire de 300 tonneaux, ayant 100 pieds de longueur du gouvernail à l’avant, dont 87 pieds de longueur utilisable, et une largueur de 25 pieds, pouvait embarquer légalement 470 esclaves, mais, sans surveillance, était chargé de plus de 600 esclaves.
L’entrepont avait une hauteur de 5 pieds 8 pouces,et, sur toute la longueur du bâtiment, il y avait une plate-forme de 6 pieds de largueur, laissant entre elle et le pont supérieur, un espace de 2 pieds et demi de haut. Les esclaves couchaient sur le plancher du pont et sur cette plate-forme, qui constituait un étage intermédiaire. L’entrepont était divisé en trois chambres, aérées par des caillebotis, écoutilles fermées par des grilles de bois. À l’ avant il y avait une chambre pour les hommes, à l’arrière une salle pour les femmes, avec au milieu les enfants de moins de 15 ans.
Les esclaves ne pouvaient tenir que couchés, et lorsque le bâtiment avait le nombre réglementaire, la place accordée à chaque homme était de 6 pieds de long sur 1 pied 4 pouces de large; pour chaque garçon de 5 pieds sur 1 pouce 25; chaque femme de 5 pieds 10 pouces sur 1 pied 4 pouces; à chaque fille de 4 pieds 6 pouces sur 1 pied, le tout en mesure anglaise.

Il pouvait tenir sur ce type de bateau, dans ces conditions terribles, 190 hommes, 70 garçons, 180 femmes et 27 filles. Or il fut prouvé en 1789, que dans un ce bâtiment, il y avait 609 esclaves.
Les hommes étaient ferrés deux à deux, par une jambes et par le cou, les femmes n’ étaient pas enchaînées. Tous étaient nus, couchés sur des planches, et au bout de quelques jours de navigation, ils avaient des plaies sur le dos et les flancs. Tous les jours, à 8 heures, ils devaient sortir sur le tillac, où ils étaient attachés à une longe chaîne fixe qui reliaient tous les couples et ils restaient là 8 heures, pendant que l’entrepont était nettoyé et aéré. En cas de mauvais temps ils sortaient un quart d’heure par groupe de 10 esclaves. Les vivres étaient distribuées dans l’entrepont et le voyage, très meurtrier, durait de 6 à 8 semaines. Mis à part les mutineries et les épidémies, la perte était d’ environ 7%. Commercialement une perte de 5% était considérée comme minime.

Plans de la Marie Séraphique du capitaine Gaugy, armée par M. Gruel de Nantes pour l'Angola, avec tonneaux à flancs de cale, 307 Noirs entassés à l'entrepont et pont, 1770

Plans de la Marie Séraphique du capitaine Gaugy, armée par M. Gruel de Nantes pour l'Angola, avec tonneaux à flancs de cale, 307 Noirs entassés à l'entrepont et pont, 1770 Source wikipedia


En 1780, il y avait 673.500 esclaves africains aux Antilles et entre 1780 et 1789, il y eut annuellement 36.500 esclaves africains transférés.
Il est difficile d’évaluer la quantité de captifs qu’il fallait enlever pour suffire aux besoins de la Traite négrière. Ils en mourraient beaucoup dans les captiveries d’Afrique; épuisés par la route, entassés ils périssaient de scorbut ou d’autres épidémies. Les marchands indigènes, et même les courtiers européens, tuaient tous les enfants en dessous de 3 ans, car les capitaine des navires ne voulaient pas sans embarrasser.
Au Sénégal, la Traite négrière se faisait à l'île de Gorée, où les esclaves venaient de la Grande Terre, c’est à dire Rufisque, qui fournissair des Wolofs et des Sérères et à Saint-Louis, où ils venaient de Galam, qui fournissait des Mandingues et des Bambaras.

Extrait Carte des peuples du Sénégal, pour servir à l'intelligence de leur histoire dressée par D. Boilat en 1853

Carte des peuples du Sénégal, pour servir à l' intelligence de leur histoire dressée par D. Boilat en 1853(Source Gallica-BNF)

En 1783, la Compagnie devint régulière sous le nom de Compagnie nouvelle du Sénégal et dépendances et dura jusqu'à sa mise en liquidation le 23 janvier 1791.

En 1784, Anne Gaston Dumontet fut remplacé par Louis Le Gardeur de Repentigny, qui peu de temps après son arrivée, fit une visite solennelle au Bour Saloum Sandéné Kodou Fall Ndao.
Il partit de l'île de Gorée le 25 février 1785 à 6 heures du matin, sur le bateau le Sénégal escorté par la corvette la «Blonde», commandée par le Chevalier de la Tour du Pin. à 17 heures, il mouilla à l’embouchure du marigot de Saloum, près du village de Fettik. Le bateau entra seul dans la rivière le 26 février 1785, et la corvette la «Blonde» appareilla pour la Gambie. Il mit 4 jours pour remonter jusqu’à la rade de Cahola, à une lieue de Cahone.

Extrait Carte des peuples du Sénégal, pour servir à l' intelligence de leur histoire dressée par D. Boilat en 1853

Carte des peuples du Sénégal, pour servir à l' intelligence de leur histoire dressée par D. Boilat en 1853(Source Gallica-BNF)

Louis Le Gardeur de Repentigny fit tirer 5 coups de canon pour saluer le Bour Saloum Sandéné Kodou Fall Ndao et l’avertir de son arrivée.
Une demi heure après, le Bour Saloum Sandéné Kodou Fall Ndao, prévenu et préparé à sa visite, apparut accompagné des chefs de ses guerriers, les grands de son royaume et une partie de sa cavalerie; soit plus de 400 hommes, coiffés d’un bonnet ressemblant à un casque et armés de lances et de fusils.
Les grands et les guerriers étaient habillés de leur casaque de guerre. Un vêtement de forte étoffe de coton teinte en couleur jaune roux, habillant largement le corps et descendant jusqu’au dessous de la ceinture; les manches amples s’évasant au poignet, des brandebourgs de laine rouge garnissant symétriquement le devant de cet habillement; une culotte de toile blanche formant de nombreux plis, descendant à mi cuisse; et chaussés d’ une espèce de brodequin rouge. Ils avancèrent en bon ordre sur le bord du marigot. Au centre se trouvait le Bour Saloum Sandéné Kodou Fall Ndao, monté sur un très beau cheval richement harnaché avec à ses côtés un esclave, qui soutenait au dessus de sa tête, un grand parasol. Autour de cette troupe, il y avait des cavaliers détachés, qui caracolaient sans ordres, poussant des cris et prenant des attitudes extravagantes en agitants de très longues lances, dont le haut était orné d’ un petit drapeau rouge. C’étaient les griots ils allaient et venaient au plus grand galop en chantant.
Louis Le Gardeur de Repentigny, accompagné de deux officiers mis pied à terre. Le Bour Saloum Sandéné Kodou Fall Ndao vint à sa rencontre, ils se saluèrent puis s’installèrent sur des nattes, sous un grand arbre. Le Bour Saloum Sandéné Kodou Fall Ndao avait à sa droite, le grand Alkier de son royaume, qui avait à sa droite le chef des guerriers, dont le titre est Farba et à sa gauche, Monsieur Louis Le Gardeur de Repentigny, deux officiers, son secrétaire et un interprète.
Ils étaient au centre de 60 guerriers à pied, armés de lances, formant une enceinte de 20 pas de diamètre. Sur un signe du Bour Saloum Sandéné Kodou Fall Ndao, les griots par trois sons de trompe imposèrent le silence. Les interprètes s’avancèrent devant eux, et ils échangèrent des civilités remettant au lendemain les négociations.
Louis Le Gardeur de Repentigny l’invita à bord de son bateau, et le conduisit, accompagné de son Alkier, du Farba et quatre grands de son royaume, dans la chambre du Conseil où il l’installa dans un fauteuil. Le Bour Saloum Sandéné Kodou Fall Ndao était de stature élevée et bien proportionnée. Il était coiffé d’un bonnet bleu, garni de petites bandes d’or de forme cylindrique, avec dans les intervalles des petites plaques de même métal, très bien travaillés. Ces ornements arrangés symétriquement, s’appuyaient sur une une bande de larges plaques d’or, avec au sommet un très gros bouton du même métal, ciselé et travaillé à jour; tous ces éléments donnait à ce bonnet l’air d’ une couronne. Il était vêtu d’une tunique ample, d’étoffe de coton blanc, rayé de rouge, qui descendait jusqu’au genoux, et serrée sur les reins par une ceinture de même couleur, dont les deux extrémités retombaient sur le côté gauche et descendaient en dessous des genoux. Cette tunique était ouverte sur la poitrine et ornée des deux côtés, de larges brandebourgs de laine rouge. Sur l’estomac pendait un globe d’or de la forme et de la grosseur d’un oeuf de poule, suspendu au cou par un cordon de soie cramoisi. Ce globe renfermait l’extrémité d’une queue d’ éléphants de 14 pouces de longueur; les crins noirs de celle-ci flottaient légèrement. Les manches de la tunique étaient courtes et laissaient à découvert des bras nerveux, charnus et bien proportionnés. Il portait comme les autres guerriers, une culotte de coton blanc, qui formait une multitude de plis, descendant jusqu’à mi cuisse et ressemblant à des cuissardes; et était chaussé de sandales liées jusqu’à mi jambe par des bandelettes. Des anneaux d’or entouraient ses bras, et un large cimeterre avec une poignée en or, dans un fourreau de maroquin chargé de plaques de même métal, qui pendait au côté droit, suspendu par un baudrier de drap rouge richement orné.
L’entretien dura deux heures et au couché du soleil, le Bour Saloum Sandéné Kodou Fall Ndao le quitta en l’invita à venir le lendemain à Cahone, son lieu de résidence. Il lui enverrait des chevaux et pour lui donner une marque éclatante de sa confiance, le pria de garder sa couronne, dont le poids l’embarrassait et l’incommoderait dans le trajet de retour.
Le lendemain à la pointe du jour, le Bour Saloum Sandéné Kodou Fall Ndao fit conduire au bateau, les chevaux qu’il avait promis et une escorte de 100 guerriers à cheval.
Monsieur Louis Le Gardeur de Repentigny descendit, suivi des officiers et des personnes de son cortège, escorté par un détachement de soldats, et se rendit à Cahone où il arriva vers 8 heures. Il descendit de son cheval à l’enceinte du quartier royal. Le son de plusieurs trompes annonça son arrivé, et le grand Alkier et le Farba vinrent le recevoir.
Trois vastes cours bordées de cases, habités par les serviteurs du Bour Saloum, précédaient son logis. Chacune gardée par 20 hommes armés de flèches et de sagaies. L’enceinte particulière du Bour Saloum était très vaste, et renfermait plus de 60 cases, habitées par ses femmes, ses enfants, ses officiers et ses esclaves de confiance.
Au milieu d’un espace au centre, était placée seule et isolée, la case royale; elle était cylindrique, d’un diamètre de 30 pieds, et 40 de hauteur. Sa couverture était de forme conique de 20 pieds d’élévation. Cette construction ne différait par de toutes celles de cette partie de l’Afrique, c’étaient des pièces de bois recouvertes de paille de mil.
À l’intérieur les parois étaient ornées de lambris et couvertes comme le dôme de nattes de différents dessins, bien travaillés. Tout le pourtour, était garnis de fusils, de pistolets, de sabres, de poignards, de selles, de brides, de housses, d’arcs et de carquois garnis de flèches, de lances et de sagaies. Un mastic de sable fin mêlé de terre rouge, pétri avec de l’eau gommée, recouvrait le sol. Le fond vis à vis de la porte, était occupé par deux estrades de 4 pieds de longueur chacune, élevées de 10 pouces, et recouvertes de tapis de drap bleu.
Louis Le Gardeur de Repentigny trouva le Bour Saloum Sandéné Kodou Fall Ndao assis sur une des estrades, celui-ci se leva, s’avança vers lui, prit sa main et le fit asseoir à sa droite sur l’autre estrade. Après les démonstrations d’égards et d’amitié, Louis Le Gardeur de Repentigny se leva et lui rendit son bonnet en forme de couronne, et, sur la demande du Bour Saloum Sandéné Kodou Fall Ndao, le lui plaça sur la tête.
Le Bour Saloum Sandéné Kodou Fall Ndao ordonna le silence et lui dit par l’entremise d’un interprète:
«Je te vois chez moi, dans ma case, en présence des grands de mon royaume, et j’ai grand plaisir à te voir. Tu as à parler, parle-moi avec la même confiance et la même franchise, que si tu parlais à ton frère; dis-moi ce que tu désires, je t’écouterai avec attention; et si tes désirs sont tels, que je puisse les accomplir, et qu’ils soient avantageux à mes grands et à mon peuple qui t’écoutent, ils seront satisfaits. Je t’aime, je t’estime, et j’ai pour toi le coeur d’un frère.»
Monsieur Louis Le Gardeur de Repentigny parla d’un Traité d’alliance, qui était l’objet de son voyage, le Bour Saloum Sandéné Kodou Fall Ndao répondit que cette affaire majeure devait être discutée en public, en présence des principaux chef du pays et du peuple et ordonna leur convocation pour le lendemain.
Cette affaire fut discutée et résolue sur une grande place du village royal, après cinq jours de discussions particulières, les articles furent arrêtés.
Le traité en double exemplaire, fut rédigé sur deux colonnes, l’une en arable, par le grand Marabout, et l’autre en français par le secrétaire de Monsieur de Louis Le Gardeur de Repentigny, ils le signèrent, puis les placèrent sur une natte, entre eux et jurèrent, la main droite posée sur ceux-ci, de l’observer. Tous les chefs du royaume de Saloum et toutes les personnes qui accompagnaient Monsieur Louis Le Gardeur de Repentigny répétèrent le même serment à haute voix, et le peuple témoigna sa satisfaction par de longues et bruyantes acclamations.
Le Bour Saloum Sandéné Kodou Fall Ndao ordonna de nouveau le silence, et remit un exemplaire à Monsieur Louis Le Gardeur de Repentigny, et garda l’autre, qu’il plaça sur sa poitrine, sous sa tunique.

Les trois conditions principales de ce traité d’alliance, signé le 8 février 1785, étaient la cession de l’île de Kasthiambée en toute propriété à la France, qui serait la seule Nation reçue dans le royaume du Saloum, et l’autorisation d’établir un Comptoir à Kiawer, l'un des plus fameux marchés de captifs de la côte d'Afrique occidentale.
Sources Galica-BNF : Les origines de l'Afrique occidentale : histoire du XVe siècle à 1870 . Pour télécharger le livre cliquer ici.

À cette date le bataillon d'Afrique ne comptait plus que 4 compagnies de fusiliers au lieu de 6. Son effectif de 398 hommes était placé sous les ordres du Commandant François Blanchot de Verly, plus tard Gouverneur du Sénégal.
La défense de Saint-Louis était assuré par un corps de volontaires et son artillerie était constituées par 82 pièces de canon trouvées lors de sa reprise et par celles retirées de l'l' île de Gorée.

Dans les premiers jours d'avril 1785, Jean-Baptiste-Léonard Durand fit le voyage de Podor, dans l'intention de prendre connaissance du poste, de s'assurer le cours de la rivière, de parcourir ses rives, et d'assister à la traite de la gomme, en parle ainsi :
« Avant d'arriver à Todd, et à quelques lieues de cette île, j'aperçus, sur la rive gauche, une nombreuse cavalerie, et j'appris bientôt que le roi Brak me faisait demander des chaloupes pour venir à bord du bâtiment.
Je fis partir deux petits canots ; ils conduisirent le roi, cinq de ses ministres et quatre musiciens. Dès que le prince fut en rivière, je le fis saluer de neufs coups de canon ; je lui donnait la main pour monter à bord, et lui rendis les honneurs que je crus pouvoir le flatter. Le roi était vêtu d'une chemise blanche qui descendait jusqu'aux genoux, et qui était serrée par une écharpe rouge ; il portait par dessus une espèce de tunique jaune, large et flottante ; sa tête et ses jambes étaient nues ; il avait à ses pieds des pantoufles jaunes ; sa suite était vêtue suivant l'usage du pays.
Je conduisis le roi sous une tente placée sur le pont du bâtiment : là, assis et couverts, nous nous fîmes beaucoup de compliment et des protestations d' amitié ; je lui offris des rafraîchissement qu'il accepta : on lui servit du vin de Bordeaux dont il ne voulut pas boire. Il me fit demander de l'Eau-de-vie (alcool) : je donnais mes ordres, et sur le champ on apporta plusieurs flacons de cette liqueur ; il en but quatre grands verres en très peu de temps, et ne mangea presque rien ; au cinquième il perdit la parole, et le sixième l'endormit profondément. Ses ministres et ses musiciens furent très sobres ; ils burent peu.
Le roi, dans cette état d'assoupissement, était entouré de sa suite ; les uns cherchaient à rafraîchir l'air en agitant au dessus de sa tête et en tous sens une pagne violemment secouée par des bras nerveux. Cette manière de vibrer l'air pour le rendre plus frais, est d'un usage général dans le pays ; les autres étaient occupés à éloigner de sa personne les mouches qui pouvaient le piquer, et troubler ainsi son sommeil.
Je m'amusais beaucoup de cette farce ridicule, lorsqu'on vint m'avertir que le dîner était servi. J'invitais les ministres à me suivre, mais ils ne voulurent pas quitter leur maître. Je me mis donc seul à table. Peu de temps après sa majesté s'éveilla ; elle demanda à me voir : on lui dit que je dînais. Sans moi, répondit-elle : ce blanc est bien malhonnête. Elle se leva, et descendit dans la chambre où le couvert était mis, monta sur une chaise, sauta de l'autre côté, fut s'asseoir sur une des fenêtres, et plaça ses pieds sur la table.
Dans cette posture, qui me fit beaucoup rire, le roi reçut ce qu'il parut désirer ; mais pour boire il demanda encore de l'Eau-de-vie (alcool) ; je lui en fis donner tant qu'il voulut, et pour la seconde fois il en bu tant, qu'il tomba ivre mort dans l' embrâsure de la fenêtre.
Ses ministres l'enlevèrent pour le porter sur le pont, en le passant par dessus la table. Sa majesté n'était pas tellement endormie, qu'elle ne témoignât ses regrets de la quitter ; elle fixa un lièvre, le pris par la tête, et l'emporta avec elle ; il me semble encore la voir tenant, pour sceptre, un lièvre à la main.
Après mon dîner, extrêmement gai, je montai sur le pont pour savoir des nouvelles de sa majesté. Je la trouvai un peu remise de son étourdissement ; nous causâmes quelques instants sur les avantages de nos relations commerciales. Enfin il fallut nous séparer : je lui fis les présents d'usage, dont elle parut satisfaite, et je n'oubliai pas d' augmenter la dose d'Eau-de-vie (alcool) ni les dons que les ministres et les musiciens pouvaient attendre de moi. Tout le cortège me fit des remerçiments, et nous nous séparâmes les meilleurs amis du monde.
À quelque distance du bâtiment, je fis encore saluer le prince de neufs coups de canon : et lorsqu'il fut rendu à terre, je le vis monter à cheval, se mettre à la tête de sa troupe, et prendre bravement la route de son village.
Le soir causant avec ses ministre, le roi voulu savoir ce que je leur avais donné. Chacun lui rendit compte, et tous convinrent qu'ils avaient reçu, entre autres choses, une portion assez forte d'Eau-de-vie (alcool). Il voulut la diminuer pour augmenter la sienne. Un seul méconnu ses ordres, et refusa d'y obéir, il le fit arrêter sur le champ, celui-ci résista et fut blessé de plusieurs coups de couteau à l'épaule gauche. Le lendemain, dès le matin, ce ministre de la veille, homme de vingt-cinq à trente ans, d'une belle figure, grand, robuste et bien fait, fut conduit à mon bord chargé de fers, et vendu pour cent barres, 480 francs.
Je fus touché de la disgrace de ce malheureux. Il versait quelques larmes ; je crus devoir les essuyer, et je parvins à les tarir. Je le fis conduire à l'île Saint-Louis : on pansa ses blessures, qui furent bientôt cicatrisées. Dans la suite ses amis vinrent le réclamer ; je le rendis à sa famille et à la liberté ; il se retira dans le royaume du Cayor.
Le Royaume des Foules ou Poules , qui vient après celui de Hoval, commence à l'île morfil, sur la quelle est située le fort du Podor. Il est gouverné par un prince nommé Siratik : c'est encore un nom de dignité, auquel de roi ajoute celui de sa famille. Cet état est bien plus grand que le royaume précédent : il s'étend sur les bords de la rivière, dans une longueur d'environ de 200 lieues, jusqu'au Royaume de Galam : sa largeur est inconnue.

Carte des peuples du Sénégal, pour servir à l' intelligence de leur histoire dressée par D. Boilat en 1853

Carte des peuples du Sénégal, pour servir à l' intelligence de leur histoire dressée par D. Boilat en 1853

Carte des peuples du Sénégal, pour servir à l' intelligence de leur histoire dressée par D. Boilat en 1853 - Source Gallica - BNF


Le Siratik est bien plus puissant que le Brak (Fara Penda Tegg Rella Mbodj), il a une cavalerie plus nombreuse. Ses États sont divisés en plusieurs province, et chaque province est gouverné par un lieutenant qui commande les milices ; il a un pouvoir absolu.
La couronne chez les Foules, est héréditaire ; elle passe au fils aîné s'il est marié à une princesse du sang royal : dans le cas contraire, elle est dévolue au frère aîné du roi ou à son neveu. En cas de contestation, et ces cas arrivent souvent, les grands se réunissent, et élisent un roi qu'ils ne peuvent prendre que dans la famille régnante.
Ce pays était gouverné par un Marabout noir, nommé Almany Abdulkader (Abdoul Kader Kane). Ce Prince avait une très grande réputation de sainteté et de valeur ; il avait un empire absolu sur ses sujets et même sur les États voisins : on venait de toutes parts acheter ses « Gris-gris » et lui baiser les pieds.
Il eut à craindre d' Alikoury, prince maure, roi des Trarzas ; il marcha contre lui avec une armée nombreuses, il traversa les États d'Amet Mocktard, autre prince maure, roi des Brackna ; fit alliance avec lui, et arriva enfin sur les terres d'Alikoury. Le Prince maure se présenta avec courage , combattit valeureusement et fut tué. L'Almany (Abdoul Kader Kane), victorieux, rentra dans ses États, plus puissant et plus révéré que jamais.
Alikouty était chez moi à l'île Saint-Louis, lorsqu'il fut instruit de la marche d'Almany ; il parti sans être troublé et sans se dissimuler le danger dont il était menacé ; il me fit ses adieux. C'était un brave homme qui prévoyait sa destinée ; il aurait pu l'éviter en s'enfonçant dans le désert ; mais sa fuite eût été une lacheté ; il préféra la mort.
Dans la suite, Damel (Birahima Fatim Penda Fall), roi du Cayor, déjà jaloux de la puissance de l' Almany (Abdoul Kader Kane) et de son influence sur les autres États, en fut outragé et personnellement insulté. En rétablissant la vérité des faits, voici de quel manière on raconte cette aventure. Almany (Abdoul Kader Kane) ne mettait plus de bornes à la domination qu'il avait usurpée ; ses succès et les flatteurs qu'il écoutait avec plaisir, lui firent perdre la tête.
Un jour il envoya au Damel (Birahima Fatim Penda Fall), un ambassadeur, suivi de deux hommes qui portaient chacun un grand couteau fixé au sommet d'une grande perche. Admis avec sa suite à l'audience du Damel (Birahima Fatim Penda Fall), l'ambassadeur exposa les intentions de son maître, et lui fit présenter les emblèmes de sa mission.
Les deux couteaux furent mis devant le Damel (Birahima Fatim Penda Fall), et l'envoyé lui dit :  Avec ce couteau, Almany (Abdoul Kader Kane) ne dédaignera pas de raser la tête du Damel, si Damel en vrai Musulman, veut se reconnaître le vassal d'Almany, comme chef suprême de la religion de Mahomet ; et avec celui-ci Almany (Abdoul Kader Kane) coupera la gorge de Damel, si Damel refuse de souscrire à cet condition.
Le Damel ,(Birahima Fatim Penda Fall) répondit froidement qu'il n' avait pas de choix à faire, et qu'il ne voulait avoir ni la tête rasée, ni le cou coupée ; il dit et congédia poliment l'ambassadeur.
Almany (Abdoul Kader Kane) fut irrité de cette résistance ; il se mit à la tête d'une puissance armée, et entra dans les États du Damel du Cayor. À son approche, les habitants des villes et des villages comblèrent leur puits, détruisirent leurs subsistances, et abandonnèrent leurs demeures. Il marchait ainsi de place en place, depuis plusieurs jours, sans rencontrer opposition, et cependant son armée souffrait beaucoup de la disette d'eau ; plusieurs de ses soldats étaient morts en chemin. Il la conduisit dans un bois où il trouva de l'eau ; les soldats apaisèrent leur soif; puis accablés de fatigue, ils se couchèrent sans précautions et s'endormirent. Ils furent attaqués dans cette position par le Damel (Birahima Fatim Penda Fall), et complètement défaits. Dans leurs sommeil, plusieurs furent foulés aux pieds des chevaux, d'autres furent tués en essayant de s'échapper ; un plus grand nombre fut fait prisonnier : Almany (Abdoul Kader Kane) lui-même fut fait esclave, et conduit devant le Damel (Birahima Fatim Penda Fall) qu'il avait osé menacer. Il se présenta étendu sur la terre devant le généreux Damel (Birahima Fatim Penda Fall), qui, au lieu de le percer de sa lance, comme il est d'usage en pareil cas, le regarda d'un oeil de pitié, et lui dit : «  si j'étais à votre place, que feriez-vous de moi ? Je vous tuerais, répondit l'Almany (Abdoul Kader Kane) avec beaucoup de fermeté, et je sais que c'est le sort qui m'attend. Non, répliqua Damel, ma lance est teinte du sang de vos sujets tués au combat ; mais je ne la rougirai pas davantage. En la trempant dans le vôtre, cela ne rétablirait pas mes villes, et ne rendrait pas la vie aux hommes qui sont morts dans les bois. Vous ne mourrez donc pas de ma main ; je ne vous arracherait pas la vie de sang-froid, mais je vous retiendrai prisonnier jusqu'à ce que je sois assuré que votre présence, dans vos États, ne sera plus dangereuse pour vos voisins. Almany (Abdoul Kader Kane) resta donc prisonnier à la cour du Damel du Cayor ; il y resta trois mois ; et loin d'être réduit à la condition des esclaves, il y fut traité avec la plus grande distinction. Au bout de ce terme, Damel (Birahima Fatim Penda Fall) céda aux sollicitations des sujets d'Almany (Abdoul Kader Kane) ; il leur rendit leur roi.
Almany (Abdoul Kader Kane) profita de cet leçon ; il gouverna avec plus de prudence et de sagesse ; il n'inquiéta plus ses voisins, et rendit ses peuples heureux.

En avril 1785, à la période de la traite de la gomme, Jean-Baptiste-Léonard Durand, rencontra au fort du Podor, le roi des Trarza, Hamet Mocktard, son frère, la reine, sa fille et leur suite. Monsieur de Beccaria, capitaine au bataillon d'Afrique, commandait le petit détachement formant la garnison de la place.
Voyons ce qu'il en dit :
« Cet officier me reçut avec empressement. Les Maures parurent satisfaits de me voir; je restai avec eux la journée entière et le soir je revins à mon bord. Le lendemain, le roi, son frère la reine et sa fille me firent demander à dîner ; ils vinrent de bonne heure, et je dois dire que pendant plus de deux mois que je restai dans les environs de Podor, cette famille m'honora constamment de sa présence.
Je les reçus avec distinction et au bruit du canon: M. de Beccaria les accompagnait. Nous dînâmes sous la tente que j'avais fait placer sur le pont. Hamet Mocktard, d'une belle figure, grand et bienfait, pouvait avoir quarante ans. Il était couvert d'un manteau écarlate bordé d'or faux; il portait un chapeau bordé de même et des brodequins verts. Après les premiers compliments, il se mit à son aise et resta en chemise comme les gens de sa suite: son frère n'avait aucune marque de distinction; il était vêtu comme les autres Maures. La reine paraissait âgée de trente-cinq ans et d'une taille ordinaire; elle était si prodigieusement grasse, qu'elle ne pouvait marcher sans être soutenue par deux hommes qui ne la quittaient jamais. Sa fille avait seize à dix-sept ans, l'oeil vif et l'air doux: sa figure était parfaitement belle ; elle avait des formes agréables et une belle tournure. La mère et la fille étaient vêtues suivant l'usage du pays, mais elles étaient couvertes d'or et de corail.
Le dîner fût fort gai les convives se conduisirent avec autant de retenue que de décence ; pas le moindre désordre ni le plus petit excès. Pendant tout le dîner nous fûmes régalés de la musique du roi.
Le soir, les convives se retirèrent dans le fort chaque jour, dès le matin et pour toute la journée, je recevais la même visite, quelquefois et assez souvent nous allions promener sur l'une ou l'autre rive de la rivière, et la fille du roi était toujours de la partie. Elle m'apprenait quelques mots arabes, et je lui enseignais le français: avant de nous séparer, elle en savait assez pour exprimer sa pensée,et demander ce qu'elle désirait; le roi et la reine ne témoignèrent aucune inquiétude de ses familiarités avec moi. »

Sources Gallica-BNF : Voyage au Sénégal par Jean-Baptiste-Léonard Durand. Edité en l' An 10 (1802) par Henri Agasse, Imprimeur-libraire, rue des Poitevins, N° 18. Pour télécharger le livre cliquer ici.

Le 26 juillet 1785, une flotille de 27 bâtiments frétés par des habitants de Saint-Louis, partie pour Tamboucané(Tambacounda) en Galam. Il y en avait un de 50 tonneaux appartenant au Sieur Benis, un de 150 tonneaux au Sieur Aubry de Nantes; les gabarres de la Compagnie et le bâtiment du Roi les escortaient. C’était le capitaine africain Thévenot qui était chargé de payer les coutumes à mesure qu’ils passaient les villages de Podor, Mafou, Djoulbé-Diabé (Gueule du Diable), Saldé, Bosséa, Bakel et enfin Galam, terre promise des acheteurs d’ esclaves africains.

Le 26 août 1785, le traitant Saugnier partit de Saint-Louis à bord d’un vaisseau de 70 tonneaux le «Furet», avec 24 Laptots et 4 gourmets (timonniers), un maître de langue, un charpentier, un capitaine, un second, 6 pileuses de mil, 12 gamins appelés «rapasses», qui faisaient le service de mousses . La nuit tout le monde couchaient pêle-mêle dans des hamacs ou sur le plancher du bâtiment. Il était armé de 6 espingoles françaises et anglaises. À 20 heures, ils arrivaient au marigot des «Maringouins», comme c’était la première fois que le «Furet» passait cette ligne, il fut baptisé ainsi que tous les passagers qui étaient dans le même cas. Un tonneau d’Eau de vie fut mis en perce et il y eut une grande fête.

En novembre 1785, Louis Le Gardeur de Repentigny fut remplacé par Stanislas Jean Chevalier de Boufflers, Colonel et bel esprit, ayant une réputation littéraire bâtie sur quelques vers qui le conduirait à l’Académie française il avait été Abbé, puis Chevalier de Malte, avant de quitter le petit collet pour l’épée. Il recherchait le Commandement de Saint-Louis avec l’intention de se créer une fortune indépendante qui lui permettrait de renoncer, pour se marier, aux bénéfices ecclésiastiques qui constituaient ses seules ressources.
Il écrivit en parlant de Saint-Louis : "ce qu'on appelle mon gouvernement est la plus pauvre, la plus sale, la plus dégradée et la plus hideuse des masures, sans portes ni fenêtres, sans planchers, ou du moins, ceux qui y sont ne se soutiennent pas; les murs tombent en poussière, les chambres sont meublées de haillons, les chaises cassées, les tables brisées. Je ne parle pas des fortifications et ne m'en occupe pas encore ; elles sont dans un tel état qu'elles seraient nulles quand même elles seraient en état. Le pain est mauvais, l’eau saumâtre".
Il demanda vainement au Ministre de lui envoyer une machine à dessaler, inventée par le Sieur Poissonnier. Les quelques ouvriers, dont les bons étaient rares, étaient censés travailler de 6 heures à 18 heures, mais il prenaient 2 heures pour déjeuner et 5 heures pour dîner et leur goûter, de sorte qu’ils ne travaillaient que 5 heures, qui valaient à peine 3 heures d’un ouvrier de France. Il n’ y avait pas un canot en état, et après les avoir réparés il fallut faire des rames. Les plate-formes, les affûts des canons étaient pourris. Le délabrement des lits et du casernement étaient à pleurer; et l’hôpital n’avait pas de toit.
Les établissements se composaient de Saint-Louis, l'île de Gorée, et des magasins et captiveries de Joal et Portudal.
Les compagnies de fusiliers étaient réduit de 6 à 4, et l’état de paiement comportait 398 hommes au Bataillon d’Afrique, sous le commandement de François Blanchot de Verly, ancien capitaine de chasseurs du régiment de Chartres, qui débutait au Sénégal.
La Compagnie fournissait pour les hommes de la farine avariée; Stanislas Jean Chevalier de Boufflers fut obligé de leur donner trois rations de mil par semaine. Il montrait la plus louable activité; il se levait avec le soleil, assistait à la manoeuvre, donnait des audiences, visitait les travaux; il recevait à sa table quinze personnes, tant civils que militaires, tous les officiers des navires se trouvant dans la Rade, et leur faisait la meilleur chère qu’il pouvait. Après son dîner, il montait à cheval et se promenait soit dans l’île Saint-Louis, soit dans les îles voisines. Il louait peu son entourage excepté François Blanchot de Verly, qu’il avait pris comme second. Il trouvait l’ordonnateur d’Aigremont droit et francs, bon calculateur mais un peu dur avec ses subordonnés. Il décrit l’ingénieur Sylvain Meinrad Xavier de Golbéry , comme ayant beaucoup d’esprit et de talent, mais d’un caractère difficile, plein de morgue.
Le Directeur de la Compagnie était Jean-Baptiste-Léonard Durand, qu’il trouvait trop léger pour sa place et pour le pays.

Jean-Baptiste-Léonard Durand

Portrait Jean-Baptiste-Léonard Durand



Stanislas Jean Chevalier de Boufflers fit transférer, au delà du fleuve, sur une plage déserte, le cimetière de Saint-Louis, qui se trouvait jusque là dans une petite enceinte au milieu de la ville où les fosses mal faites laissaient à découvert les corps lors des inondations . Il ordonna que dorénavant, les deux africains fossoyeurs enlevassent le mort sur une pirogue dans un cercueil qui servait à tout le monde; ils le transporteraient à la Pointe de Barbarie, dans un endroit clos de murs, et ramèneraient le cercueil à la traîne; eux mêmes poussant la pirogue à la nage, de sorte que lui et les hommes soient désinfectés.

Le 11 janvier 1786, le Directeur de la Compagnie du Sénégal, Jean-Baptiste-Léonard Durand, envoya de Saint-Louis, par terre, le Sieur Rubault à Galam, qui partit de Gandiol le 13 janvier 1786, accompagné d’un Maure d’une tribu de Marabout Trarza, nommé Sidi Carachi, 2 africains et trois chameaux portaient les provisions et les armes nécessaires pour le voyage.
Il traversa le Cayor et le Djolof, où il arriva le 18 janvier 1786 à Ikarkor (Ouarkor),résidence du Bour, à qui il présenta les lettres que Jean-Baptiste-Léonard Durand, lui avait données pour les chefs du pays. Le Bour lui parut ignorer tout des français, les africains de ce village n’avaient jamais vu de blancs.
Le 25 janvier 1786, il repartit, accompagné par 3 guides, qui lui avait été donné, et traversa pendant 4 jours un forêt de gommiers non exploités et arriva à un village nommé Passé (Possy ?) Le 1er février 1786, il parvint dans le Bambouk, et sans vivres, ni marchandises, il traversa sans être molesté, et sans risque le pays montagneux de Youli (Niaoulé), habité par les Mandingues et qui avait pour capitale un village appelé Médina, sur la Gambie.
Il s’arrêta 2 jours, dans une grande forêt où il vit des girafes, qu’il appelait «Guimala», puis le 10 février 1786, il pénétrait dans le Bondou, qu’il traversa, non sans peine, et le 13 février 1786, il entrait à Koussa, où résidait l’Almamy.
N’ayant rien à lui offrir, il fut retenu prisonnier pendant quelques jours. Il fut libéré contre la promesse d’un présent qu’il enverrait une fois parvenu à Galam, et arriva le 16 février 1786 à Kaïnoura sur la Falémé. Il la franchit sur son chameau, et le 17 février 1786, il rejoignit le Sénégal à Tombaboukané (Dembacané), à côté du Fort Saint-Joseph de Galam.

Carte Sénégambie de Guillaume Delisle en 1707

Carte Sénégambie de Guillaume Delisle en 1707

Le Fort Saint-Joseph de Galam était en ruine, il fallut le réédifier entièrement. Heureusement, les habitants étaient bien disposés et s’y employèrent.
Le Marabout Trarza Sidi Carachi, qui l’accompagnait, retourna à Saint-Louis par le même chemin, le 23 mars 1786, fit le voyage de retour en 206 heures, et arriva le 22 avril 1786 à Saint-Louis.

En 1786, l’état des Comptoirs était, à la veille de la Révolution française, bien misérables.
Un témoin oculaire, Sylvain Meinrad Xavier de Golbéry en fait la description suivante:
Il y avait à Saint-Louis 7.000 habitants, les établissements militaires et tous les bâtiments appartenant au Gouverneur, étaient en général d’une mauvaise construction et en mauvais état.
L’hôpital militaire, le seul de l’île, était insuffisant, mal construit, trop serré et trop borné, avec des salles basses où les malades souffraient excessivement de la chaleur, surtout pendant la saison pluies, qui était la saison des maladies. Les magasins trop petit et trop bas, une cuisine mal disposée, un laboratoire où le distillateur étouffait de chaleur et pouvait à peine se retourner, quatre salles qui pouvaient contenir ensemble, 60 lits, une seule chambre pour un seul chirurgien, une pharmacie misérable, et un très petit cabinet pour le Directeur de l’hôpital.
Il manquait de salles pour les officiers de la garnison, à plus forte raison pour la marine militaire et la marine marchande qui venaient à Saint-Louis en relâche ou pour commercer.
Les logements de la garnison n’étaient pas meilleurs, mal construits, trop resserrés, trop bas et malsains.
Le Fort Saint-Louis qui occupait à peu près le centre de l’île, n’avait pas de fossé, il était de forme carré, dont les côtés Ouest et Est, avaient chacun 34 toises de longueur, et ceux du Nord et du Sud 35 toises.
Des bastions renforçaient les angles de ces carrés, mais étaient mal tracés, et si petit, qu’à peine, quelques pièces de campagne étaient manoeuvrables.
Le terre plein était au niveau du 1er étage des bâtiments qui entouraient le développement intérieur du Fort. Ses remparts étaient établis sur des fortes poutres qui formaient le plafond des magasins et des caves en dessous, et étaient élevés de 13 pieds au dessus du terrain.

Depuis 1778, l’administration, quoi que dépendante du Gouverneur de Saint-Louis, n’était pas seulement militaire. Il y avait à la tête de la colonie un Maire africain ou mulâtre. Il était chargé de faire la police, et de se prononcer sur les rixes en première instance. Il était autorisé à infliger des peines de prison, même du fouet aux africains coupables de délits légers, à charge d’en rendre compte immédiatement.
Le Gouverneur avait près de lui un greffier chargé de l’inspection et de la garde des procédures, qui était nommé par le Roi, et le plus souvent par le Gouverneur lui-même. Il remplissait de plus les fonctions de notaire.
C’était en présence du Maire, du Commissaire-ordonnateur, du Major-commandant et de quelques notables, que les délits capitaux étaient jugés par le Gouverneur.
À l’égard des africains et mulâtres libres ou esclaves, il prononçait en dernier ressort, et le jugement était exécuté publiquement.
La condamnation à mort était rare, s’ils étaient esclaves, les coupables étaient vendus et embarqués pour l’Amérique, le produit de la vente servait d’abord à dédommager la partie lésée et le surplus était rendu au Maître après le prélèvement des frais. Cet article était toujours appliqué.
Si l’africain était libre, une partie de la vente était de même destinée à la partie lésée, le surplus était versé dans le coffre du Roi. Dans les deux cas, le Gouverneur en rendait compte au Ministre de la marine.
Les Européens étaient jugés par le même Tribunal. Celui qui troublait la tranquillité de la colonie, était arrêté, chassé de la colonie et embarqué pour la France. S’il avait tué, ou commis un vol avec effraction, s’il était rendu coupable d’un crime capital, son procès était instruit, et l’inculpé était renvoyé en France pour être jugé sur l’instruction faite au Sénégal.
En matière d’intérêt et de commerce, les contestations étaient portées en première instance devant le Gouverneur, qui cherchait à concilier les parties, s’il n’y parvenait, elles nommaient chacune trois arbitres, qui, présidé par le Gouverneur, prononçaient en dernier ressort. Si les parties étaient européennes, les arbitres étaient européens, si les parties étaient africaines, les arbitres étaient africains; et un procès entre Européens et Africains, soumis à des arbitres de l’un et de l’autre. Si l’une ou l’autre des parties refusaient de nommer des arbitres, le Gouverneur les nommaient d’office, la procédure en faisant mention.
Les jugements rendus étaient exécutés littéralement, et il n’y a pas d’exemple qu’ils aient donné lieu à aucune contestation ultérieure. Le Greffier en délivrait des expéditions aux parties qui les réclamaient, et en avaient besoin pour régler leurs comptes avec leurs intéressés ou leurs armateur.
En l’absence du Gouverneur ou s’il était malade, le commandant ou le plus ancien officier militaire le remplaçait dans ces fonctions judiciaire. Quant au Greffier, il était remplacé par un habitant qui recevait la commission du Gouverneur, du Commandant ou du plus ancien officier. Les mêmes formes de procédures s’observaient à l'île de Gorée, et partout où se trouvaient des établissements en Afrique.
L’administration civile était composée d’un Commissaire-ordonnateur, administrateur en chef de la colonie; d’un écrivain principal; d’un contrôleur; de deux écrivains ordinaires; d’un garde-magasin et d’un Greffier. L’ordonnateur, le contrôleur et le garde-magasin avaient leurs bureaux particuliers et des employés sous leurs ordres.
Il y avait encore des officiers de port, des officiers de santé, des habitants entretenus et des Laptots.
L’ordonnateur réglait toutes les dépenses, il faisait fonction de commissaire des guerres pour tout ce qui concernait la troupe; et celle de commissaire des classes pour tout ce qui concernait les gens de mer.
Le Gouverneur ou commandant disposait de la troupe, il était chargé de la police intérieur, des relations politiques avec les chefs africains du pays, de former, renouveler ou entretenir les liaisons d’amitié ou de commerce; de recevoir leurs visites, et de les rendre s’il le jugeait à propos.
Le Gouverneur était payé 24.000 livres, le Commissaire-ordonnateur 8.000 livres. Les officiers de troupe se composait du Major, commandant le bataillon d’Afrique, d’un quartier-maître, d’un adjudant et d’un armurier. Il y avait quatre compagnies de soldats, composées, sans les cadres, de 56 fusiliers chacune. La dépense totale de la garnison pour la seule solde, était de 92.456 livres.
Les officiers de port, les officiers de santé, deux missionnaires à Saint-Louis, trois à l'île de Gorée, les bureaux de l’ordonnateur, les ouvriers de la Compagnie, constituaient le reste du personnel.
La Compagnie soldait le Maire de la ville, le Capitaine du bateau du Roi, et distribuait des indemnités de logement aux divers employés; elle payait en barre de fer les maîtres de langue (interprète), les pileuses, les calfats, les gardiens de troupeaux, les Maîtres-maçons africains, et 160 Laptots.
À l'île de Gorée les dépenses étaient de 2.920 livres. À Albreda il y avait un résident, un maître de langue et trois Laptots et dans l’île de Gambia, un maître de langue et deux africains.
À Podor, un chef de poste, un garde-magasin, quelques ouvriers, quelques Laptots et quelques africains.
Les coutumes payées en 1787 étaient de 3.589 livres pour le Damel du Cayor; 4.915 livres pour le Brak (Fara Penda Tegg Rella Mbodj) du Waalo; 4.333 livres à l’Almamy des Fouls; 3.176 livres au chef de Galam; 4.347 livres au Roi des Trarza; 5.598 livres au Roi des Brakna. Les coutumes à l'île de Gorée se montaient à 2.484 livres.
Le total des dépenses, égal à 510.891 livres fut réduit à 302.161 livres en 1788.
En 1786, la Traite à Galam était de 766 esclaves africains, 4.170 livres de morfil et 686 gros d’ or. Il y avait sur le Haut-Sénégal, 23 bâtiments, dont un au Roi, trois à la Compagnie, le reste appartenant aux habitants. Dans toute la colonie au Sénégal, 2.083 esclaves africains avaient été négociés.

Stanislas Jean Chevalier de Boufflers , qui avait rendu une première visite, sans conséquence, au Damel-Teigne du Cayor Birahima Fatim Penda Fall, en fit une seconde en 1786, dans la plaine de Gandiol, près de la barre.
La veille de cette rencontre, il envoya 50 soldats dresser des tentes sur le lieu désigné. Ils creusèrent autour du camp, un retranchement composé d’un fossé, de bastions, de courtines en terre; le tout était situé dans une presqu’île à l’ extrémité de la plaine.
Le lendemain matin, Stanislas Jean Chevalier de Boufflers s’embarqua avec une escorte de 50 hommes, pour prendre position à l’entrée de son camp. le Damel-Teigne Birahima Fatim Penda Fall avait envoyé quatre otages à Saint-Louis, se présenta avec une armée de 3.000 cavaliers et y entra, accueilli avec les honneurs militaires.
C’était un homme très grand et gros, âgé d’environ 60 ans. Stanislas Jean Chevalier de Boufflers lui offrit un déjeuner aussi splendide qu’il le pouvait et lui donna des présents traditionnels; des armes, un manteau rouge galonné d’ or, etc...
Ils renouvelèrent le Traité qui avait déjà été convenu une première fois. Le Damel-Teigne Birahima Fatim Penda Fall consentit à abolir le droit d’épave moyennant une augmentation de la coutume.
Un bâtiment de commerce s’était échoué à la pointe de Dakar, il fut immédiatement entouré par des africains armés, qui se préparaient à le piller, après avoir enchaîné l’équipage.
Un des employés de Saint-Louis, Geoffroy-Villeneuve monta dans une chaloupe avec cinq soldats et quelques matelots armés d’espingoles, se rendit auprès du bâtiment, y établit ses hommes et harangua en Wolof les africains qui s’apprêtaient à l’assaillir, leurs rappelant que le Damel-Teigne, Birahima Fatim Penda Fall avait signé avec la France un Traité abolissant le droit de bris.
Après une palabre accidentée, il reçut un renfort de 20 soldats et 20 matelots et quelques heures après, parvint à alléger le bâtiment, le remettre à flot et le ramener à l'île de Gorée.

En 1787, Geoffroy-Villeneuve, chargé de ménager la cession de la presqu’île du Cap-Verd, qui avait déjà été cédée deux fois en 1763 et 1769, signa avec Damel-Teigne Birahima Fatim Penda Fall un Traité, authentifié par écrit, et déposé au greffe de Saint-Louis.
Sur la demande de Stanislas Jean Chevalier de Boufflers, Geoffoy-Villeneuve visita l’isthme de Yok à Ben, puis de là, en avril 1787, il partit pour visiter le Cayor et le Baol.
Il était accompagné de 3 blancs et 4 africains, avec une petite caravane de 4 chevaux et 2 chameaux, il fit dans ce pays inconnu un voyage de 68 jours.
Il parvint à «Nguiguis», capitale du Damel-Teigne Birahima Fatim Penda Fall, qui le reçut bien et confirma le dernier Traité.
Il poursuivit vers le Djolof à cinquante lieues dans les terres, puis se dirigea au Sud-Est vers le Baol, atteignit Portudal et Joal, et parvint chez le Roi de Sine, d’où il revint le 17 juin 1787 à l'île de Gorée.

En avril 1787, Stanislas Jean Chevalier de Boufflers alla au Podor, rencontrer le Roi Maures Hamet Moctar, qui lui parut misérable et rapace, et après avoir renouvelé l’entente traditionnelle, il rentra à Saint-Louis, obligé de faire ramener son bateau à la cordelle.

En avril 1787, cinq ou six naufrages eurent lieu sur la Barre de Saint-Louis, les habitants coururent au pillage, Stanislas Jean Chevalier de Boufflers, en fit mettre 50 en prisons, puis les gracia.

En mai il se rendit à l' île de Gorée, qu’il trouva plus plaisante que Saint-Louis, et revint par terre en 8 jours.

Plan de Gorée en 1784 par Lacaille

Carte de l'île de Gorée en 1784 dressée par le Marquis de Lajaille - Source Gallica - BNF


En juillet 1787, Jean-Baptiste-Léonard Durand envoya une flotte à Galam, pour chargée, les 1.000 esclaves, l’ or et le morfil qu’avaient accumulé Rubault. Quand elle arriva, les esclaves révoltés venaient de l’assassiné et toutes les marchandises pillées. Les africains du village voisin prétendirent n’avoir rien entendu de la lutte, et rien du du pillage.
Le Fort Saint-Joseph de Galam fut complètement abandonné.

Le 28 décembre 1787, un incendie éclata à Saint-Louis; il n’y avait ni pompe, ni seaux, ni haches; 60 cases flambèrent d’un coup, ils firent des abattis pour arrêter le feu, mais 140 maisons brûlèrent.

En 1787, le Stanislas Jean Chevalier de Boufflers quitte le Sénégal et son second François Blanchot de Verly major du bataillon d'Afrique, en assure le gouvernement intérimaire, jusqu'à sa nomination en 1788.
La Compagnie nouvelle du Sénégal et dépendances, qui fournissait aux dépenses militaires et d'administration, fut mise en liquidation le 23 janvier 1791, par un décret de l'Assemblée constituante, établissant la liberté du commerce, mais continua d'assurer les dépenses jusqu'en octobre 1791. Après cette date tout manqua. Le Bataillon d'Afrique composé de 378 hommes en 1787 et 240 en 1789, ne comptait plus que 91 hommes répartis entre Saint-Louis, l' l'île de Gorée et l'île Gambia.

En août 1793, à la suite d'une demande du capitaine Bourgneuf, envoyé en France par François-Michel-Emilie Blanchot de Verly, pour exposer la détresse des possessions et la nécessité de renforcer de 200 artilleurs, la garnison réduite à 84 hommes, le Ministre de la Marine, Jean Dalbarade s'aperçut qu'un bateau Le Henri, armé depuis 18 mois à Pauillac pour aller ravitailler la côte d'Afrique, n'était pas parti.Il le fit recharger et donna l'ordre de son départ qui semble n'avoir jamais été exécuté.

Le 16 Pluviôse de l'An II (4 février 1794), la Convention (montagnarde) proclame l'abolition de l'esclavage, réduisant encore plus les ressources de la colonie, qui n'était déjà plus approvisionnée depuis 18 mois.
Depuis le 1er janvier 1793, le faible contingent, qui constituait la troupe n'était plus payé. Le traitement des administrateurs était dû depuis 1792. Les 200 artilleurs, demandés à Paris pour venir renforcer la faible garnison composée de 84 hommes n'avaient pas été envoyés. Malgré tous ces contretemps, François Blanchot de Verly ne perdant pas de vue les intérêts de la Colonie, proposa la réoccupation de Podor. L'ile Saint-Louis étant devenu trop petite pour les habitants, il acheta à un des descendants de Jean Barre, moyennant le paiement de coutumes, les îles de Babaghé, de Safal et de Guéber, situées en aval de Saint-Louis. Il installa un poste à Babaghé, mais les habitants de Saint-Louis refusèrent de quitter leur île.

En 1797, une escadre anglaise, composée d'une Frégate et de 3 corvettes, bombarda l'l' île de Gorée. La garnison composé de 10 hommes commandés par Guillemin, premier lieutenant au Bataillon d'Afrique, et des habitants armés par ce dernier, obligea les anglais à se retirer. Il n'y eut qu'un tué et 4 blessés.

En l'An VII de la République (1798), les Maures, qui convoitaient depuis longtemps le Waalo sur la rive gauche du Sénégal, estimant le moment propice pour les chasser du fleuve, commencèrent une guerre qui devait ruiner le commerce de la Colonie pendant de longues années.

Le Directoire songe enfin à satisfaire à la demande de troupes faite depuis si longtemps et envoya au Sénégal un corps d'hommes de couleur, composé de mulâtres et d'africains de la Guadeloupe et de Saint-Domingue, qui devait moraliser les africains par leur exemple. Le Gouverneur avait ordre de profiter de ces renforts et de la présences des frégates qui l'amenaient pour conserver ou reprendre l'l' île de Gorée.

En Floréal de l'An VII (avril 1799), François Blanchot de Verly envoya au lieutenant Guillemin basé à Gorée 30 africains de Guadeloupe, mais une division anglaise de 2 vaisseaux, 3 frégates> et un transport chargé de troupes, s'étant présenté devant Gorée le 5 avril 1800, suite au refus des habitants de se joindre à la garnison, le lieutenant Guillemin capitula avec les honneurs de la guerre. Le sous-lieutenant Alain put cependant, avec 20 hommes, gagner Dakar, puis par voie de terre, Saint-Louis.

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