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Histoire des Damels du Cayor.
Au XVIe siècle, un descendant de
Ndiadiane Ndiaye,
Latmingué Diélène (
Latir Mengue Gnilane Njie) du
Djolof) a lancé plusieurs guerres contre les royaumes
Sérères. Bien que sa mère soit aussi une
Sérère du
Saloum et un membre de la famille noble
Ndour et de la dynastie maternelle de
Guelvar. Il ne réussit pas à coloniser le
Royaume du Sine, mais il a été victorieux à la bataille de Djilor (un territoire assez important de la famille Sarr). Il a également réussi à usurper le trône de la Maad Saloum (Roi du
Saloum Guiranokhap Ndong ou
"Giraanoxap Ndong".
Après sa victoire dans le
Saloum, il a encouragé la migration de
Wolofs du
Djolof au
Saloum
Les
Wolofs suivaient leurs filiations par les femmes, avec autant, sinon plus de soins que leurs filiations par les hommes. Seule la femme transmettait certains noms et certains droits. La famille par les femmes s’appellait «
Khêt»; elle devait seule hériter des droits politiques et des droits au pouvoir.
Les
Damels étaient choisis dans les familles royales (
Garmi), les Khêt étaient au nombre de sept: les
Mouïoy, les
Ouagadou, les
Dorobé, les
Gueidj, les
Guélouar, les
Sogno et les
Bey, ces derniers étaient originaires du
Gabou (Kaabu) (
Mandingues) de la Haute-
Casamance) contrairement aux autres qui étaient nés dans le pays.
La filiation paternelle existait aussi; cette famille s’appellait «
Sant», et le fils portait le nom de Sant de son père devant son nom personnel.
Le
Cayor faisait autrefois partie du Royaume du
Djolof; le
Bourba Djolof nommait les différents chefs des Provinces du
Cayor, qui sous les ordres d’ un
Laman (Laman est un nom Sérère qui signifie chef de territoire), également nommé par lui, administrait, en son nom le pays.
Vers 1549,
Déthié Fou Ndiogou (Mouïoy de Khêt et Fall de Sant) fut le dernier à porter le titre de
Laman du
Cayor et le 1er à porter celui de
Damel du Cayor. Étant
Laman il aurait épousé
Ouagadou Ngoné Ndiaye, soeur du
Teigne du
Baol,
Gnokhor Ndiaye et eut un fils nommé
Amary Ngoné Sobel auquel le
Cayor dut son indépendance.
Outre les tributs ordinaires, le
Laman du
Cayor devait, tous les ans, envoyé au
Bourba Djolof Lélé Fouli Fak Ndiaye une assez grande quantité de sable blanc, destiné à embellir le sol de son palais. Pendant 3 ans, le
Laman Déthié Fou Ndiogou négligea de payer cette coutume, si bien que redoutant la colère du
Djolof Lélé Fouli Fak Ndiaye, il n’osa plus aller dans le
Djolof, ni même y envoyer quelqu’un pour régler les affaires du
Cayor.
Son fils
Amary Ngoné Sobel, agé d’une vingtaine d’année, lui proposa d’aller porter lui même la coutume, et demanda une suite nombreuse pour l’accompagner.
Après bien des hésitations le
Laman Déthié Fou Ndiogou accepta et le fit escorter par 700
Ayor (guerriers libres du
Cayor).
Amary Ngoné Sobel partit de
Palen-Ded, résidence de son père et arriva le lendemain matin, sur la frontière du
Djolof. Là voulant être prêt à tout événement, il recommanda à ses gens de se munir de
Diak (lance en bois dur), qu’ils se procurèrent dans les forêts voisines.
Arrivé à Sagata, il fit décharger le sable et demanda à être reçu par le Bourba Djolof, qui refusa obstinément pendant huit jours.
Amary Ngoné Sobel, profondément humilié, donna ordre à ses gens de disperser tout le sable qu’ils avaient apporté et repartit avec eux en disant qu’il n’aurait plus, désormais, rien de commun avec un Djolof qui montrait un tel mépris pour ses sujets.
Ces propos furent répétés au Bourba Djolof Lélé Fouli Fak Ndiaye, qui fit battre immédiatement ses tambours de guerre, réunit son armée et se mit à la poursuite des Ayor. Il les atteignit à Dauki, mais fut complètement battu. Après cette victoire Amari Ngoné Sobel se rendit à Kantar, dans le Cayor, et de ce village, envoya un courrier à Palen-Déb, pour prévenir son père de ce succès.
Déthié Fou Ndiogou réunit immédiatement ses Diambours (hommes libres du pays qui formaient ordinairement le Conseil), leur annonça la grande nouvelle, et leur déclara que le lien qui les attachait au Djolof était rompu; qu’il prenait le titre de Damel (de dame, casser, rompre), et demanda pour cela tous les boeufs existant entre Mbaouar et Mekhey. Cet ordre fut exécuté et en trois jours, 3.000 boeufs lui furent amenés.
À cette époque, les Ayor avaient l’habitude d’attacher aux cornes de leurs boeufs, un gros morceau de bois au bout d’une corde assez longue. Le Damel Déthié Fou Ndiogou entra dans l’enclos des boeufs, pour en choisir quelques uns destinés à être tués le soir même; quand un taureau, probablement effrayé par la multitude de gens qui l’accompagnait, se mit à courir en tous sens, faisant voltiger en l’air, dans ses accès de rage, le lourd morceau de bois pendant à ses cornes, et qui frappa si violemment la tête de Déthié Fou Ndiogou , qu’il mourut sur le coup.
En apprenant cette nouvelle, son fils Amary Ngoné Sobel se rendit immédiatement à Palen-Ded, pour ensevelir son père. Là son frère aîné, Dialène Yasser, appuyé de deux de ses frères Tié Yacine et Tié Ndella, voulut se faire élire Damel; mais la plupart des Ayor, s’étant déclarés pour Amary Ngoné Sobel , celui-ci fut nommé Damel, et ses frères reconnurent son autorité.
Trois jours après, Gnokor Ndiaye, Teigne du Baol, l’oncle d’Amary Ngoné Sobel (Fall de Sant et 1er Ouagadou de Khêt), mourut. Il se rendit avec son armée au Baol, et le titre de Teigne lui fut offert, sans qu’une goutte de sang fut versée. Il passa un mois à Lambaye, capital de ses nouveaux états, puis revint à Palen-Ded, il résolut de fonder, dans le Cayor, une nouvelle résidence royale, car Palen-Ded, suffisante pour un Laman tributaire, n’était pas en harmonie avec la puissance d’un Damel-Teigne.
Un Marabout le voyant embarrassé sur le choix de l’emplacement de sa capitale, lui conseilla de faire faire un bon Grigri, de l’attacher au cou d’une tourterelle, et de fonder un village à l’endroit où l’oiseau se poserait. Le Damel Amary Ngoné Sobel accepta, la tourterelle alla se percher sur un arbre appelé «Nguiguis» en Wolof, et un village de ce nom fut immédiatement fondé d’après les conseils du Marabout.

L’oiseau resta perché, sur le «Nguiguis» une partie de la journée, puis s’envola et alla se reposer sous un arbre connu sous le nom de «Boul», près duquel le village de Mboul fut fondé. La tourterelle passa la nuit sur l’arbre et, le lendemain matin, s’envola et sortit du Cayor sans toucher terre.
Carte 1690 du Sénégal (Source Gallica - BNF)

Amary Ngoné Sobel choisit Mboul pour capitale; mais à peine installé, le Bourba Djolof entra dans le Cayor, dans l’espoir de se rendre Maître du pays. Le Damel réunit ses guerrier et rencontra l’ennemi à Deyssimbe. L’armée du Djolof fut détruite et le Bourba, Sitakhoune Galamba, pris et tué.
Amary Ngoné Sobel épousa la nièce de son père, Tako Yougo, dont la mère était de même père et de même mère que Déthié Fou Ndiogou. De cette union naquit Massamba Tacko, auquel Amary Ngoné Sobel fit épouser sa propre soeur Tioro Ndiéguène. Il espérait ainsi que de ce mariage naîtrait des enfants Ouagagou et que le titre de Damel resterait dans cette famille, au détriment de son fils Massamba Tacko (Mouöy de Khêt), auquel il avait donné les titres de Diambour Mbaoua, de Bédienne Mbédienne et Bourmi Ngourane, attribués ordinairement aux héritiers présomptifs du titre de Damel.
Lorsque Tioro Ndiéguène fut enceinte, son frère le Damel Amary Ngoné Sobel l’enleva et la cacha au Baol, dont elle était la Linguère. Il dit ensuite à son mari, Massamba Tacko, qu’elle était morte et avait été enterrée secrètement. Celui-ci le croyant se remaria avec Khouredjia Kouly (Sogno de Khêt) dont il eut 3 fils; Makhourédia Kouly, Biram Mbanga Khouredia Kouly et Daou Demba Khourédia Kouly.
Tioro Diéguène accoucha, dans le Baol, d’un fils nommé Mamalik. Le Damel Amary Ngoné Sobel, ne pouvant faire venir celui qui devait lui succéder, et désireux de suivre sa croissance, envoya tous les ans, à sa mère, une calebasse pleine de farine de mil dans laquelle l’enfant imprimait l’empreinte de son pied; cette calebasse rapportée à son oncle, lui permettait d’estimer la taille de son neveu.
Quand il le jugea suffisamment avancé en âge, il le fit venir à Mboul, appela Massamba Tacko, et plaçant entre eux une calebasse pleine de couscous, les laissa en les invitant à manger.
Ils prirent d’ abord leur repas en silence, puis Mamalik s’étant approprié le morceau de viande, Massamba Tacko lui arracha des mains disant: ne peux tu me laisser cette viande? Ne sais tu donc pas que je suis fils de Damel-Teigne et de Linguère et que je porte les titres de Diambar, Bédienne et Bourmi. Je ne te dois rien, lui répondit Mamalik, se sais tu donc pas que je suis fils de Diambar, Bédienne et Bourmi, neveu du Damel-Teigne et fils de la Linguère Tioro Diéguène. Massamba Tacko reconnaissant son fils dans ce convive étranger, sans mot dire, se leva, jeta la viande sur le couscous et partit.
Mamalik alla aussitôt raconter au Damel Amary Ngoné Sobel, ce qui venait de lui arriver avec son père et le Damel le renvoya immédiatement dans le Baol dont il le nomma Tialao, titre correspondand dans le Baol à ceux de Diambar, Bédienne et Bourmi dans le Cayor.
Il lui dit qu’à sa mort, les Diambours du Baol le nommerait Teigne pour le remplacer, mais que s’il restait dans le Cayor, son père Massamba Tacko le ferait certainement assassiner.
Malgré leur différence de Khêt, Diété Fou Ndogou et Amary Ngoné Sobel, comptent parmi les Fall-Madior.
Linguère est un titre honorifique auquel est attaché un commandement territorial accordé par le Damel à une femme, qui devient la première femme du pays. Les conditions indispensables pour obtenir ce titre est d’être fille d’un Damel, et d’avoir pour mère une fille de Damel.
Vers 1593, le Damel Amary Ngoné Sobel mourut, son fils, Massamba Tacko (Fall-Madior de Sant, 2e Mouïoy de Khêt) fut nommé 3 ème Damel du Cayor et son fils Mamalik Teigne du Baol.
Dès que le Bourba Djolof Biram Tieouali Dialène, successeur de Sitakhoune Galamba, appris sa mort, il envahit le Cayor avec une armée considérable, mais le Damel Massamba Tacko l’atteignit à Ouélin-Garra, et le mit en fuite; le Bourba Djolof Biram-Tieouali-Dialène fut capturé et tué.
Vers 1600, Mamalik, Teigne du Baol, brûlant du désir de devenir Damel-Teigne, envahit le Cayor avec ses partisans du Baol. Les Ayor conseillèrent au Damel Massamba Tacko, de se retirer dans les provinces les plus reculées du Cayor, afin de réunir son monde; mais il s’y refusa, disant qu’il irait retrouver son fils Mamalik avec peu de gens pour lui prouver qu’il ne lui voulait pas de mal; tandis que s’il réunissait ses forces, Mamalik serait certainement battu et probablement tué; ce qu’il voulait éviter à tous prix. Il partit donc avec une poignée d’hommes et arriva à Ngolgol où était campé le Teigne du Baol Mamalik et son armée.
Dès que la petite troupe du Damel fut en vue, les gens du Baol, dix fois supérieur en nombre, se précipitèrent sur elle et, malgré une défense héroïque la mirent en fuite. Le Damel Massamba Tacko couvert de la honte de sa défaite et de la mauvaise conduite de son fils, se fit prendre. Il fut conduit vers le Teigne Mamakik, qui ordonna sa mise à mort; ce qui fut fait.
En mémoire de ce combat et des paroles prononcées par Mamalik: «Que les corbeaux ne l’emporte pas au loin»: c’est à dire que personne ne parle jamais devant moi de cet événement. Ce lieu fut appelé Ndiol-Bakhign (de Ndiol, emporter et Bakhigne, corbeau).
Cependant, les trois fils de Massamba Tacko et de Khouredjia-Kouly, c’est à dire Makhourédia Kouly, Biram Mbanga Khouredia Kouly et Daou Demba Khourédia Kouly qui se trouvaient le premier à Mbédienne, le second à Ngourane et le troisième à Ndiambar, avaient réuni leurs forces pour secourir leur père.
À leur approche le Teigne Mamalik rentra dans le Baol et Makhourédia Kouly (Fall de Sant, 1er Sogno de Khêt) revint à Mboul où il fut reconnu comme 4 ème Damel du Cayor.
Vers 1610, le Damel Makhourédia Kouly mourut, son frère Biram Mbanga Khouredia Kouly (Fall de Sant, 2éme Sogno de Khêt) lui succéda comme 5ème Damel du Cayor.
En 1640 Daou Demba Khourédia Kouly (Fall-Madior de sant, 3e Sogno de khêt), remplaça comme 6ème Damel du Cayor, son frère le Damel Biram Mbanga Khouredia Kouly, décédé après 30 années de règne. Il vexa ses sujets de toutes les manières possibles, chassa les vieillards de sa présence, s’entourant d’enfants de seize à dix sept ans, sans la moindre expérience des affaires et du pays. Il les empêcha de se marier, de porter des culottes, de mettre du sel dans leurs couscous, disant que tout cela était bon pour les Rois et les Princes, mais nullement pour ses sujets.
En 1647, à la fête de Tabaski, où il était d’usage d’aller saluer le Damel du Cayor à Mboul, les Khaganes (Diambours du Cayor), après les salutations ordinaires, se regroupèrent autour de leur chef Ncotch-Barma et décidèrent de déposer le Damel Daou Demba Khourédia Kouly, dont tout le pays était mécontent. Leurs dispositions prisent, l’un deux alla le voir et lui dire qu’ils le tueraient, s’il refusait de se retirer. Daou Demba Khourédia Kouly partit accompagné de quelques fidèles, et demanda asile au Brak du Waalo, à trois jours de marche. Celui-ci lui accorda l’hospitalité et lui donna le village de Mbéraye, où il mourut peu de temps après.
Il fut remplacé par Madior Fatim Golagne (Fall-Madior de sant, 3e Mouïoy de khêt), comme 7ème Damel. C’était un fils de Massamba Tacko, 2ème Damel Mouïoy et de sa nièce Fatim y Gologne.
Il régna 17 ans, sans qu’un seul coup de feu fut tiré dans le Cayor, il fut plein de sagesse, d’intelligence et de douceur. Pour reconnaître ses bienfaits, son peuple décida que le nom de Madior serait ajouté à son nom de Sant, Fall, et que la distinction remonterait jusqu’à son grand-père, Déthié Fou Ndiogou.
Tout comme son père, afin d’avoir le plus possible de Damel dans la famille, il épousa sa nièce Yacine Boubou, dont il eut un fils Biram Yacine Boubou, qui lui succédera.